Résumé
L’Autorité de la concurrence (ci-après « l’Autorité ») a été saisie le 28 mars 2024, par le Président de la commission des finances du Sénat, d’une demande d’avis concernant la situation concurrentielle dans le secteur de l’assurance des dommages aux biens des collectivités territoriales en France.
Après avoir interrogé différents acteurs du secteur, l’Autorité constate que, bien qu’elles ne soient soumises à aucune obligation légale quant à la passation de contrats d’assurance de dommages pour protéger leurs biens, les collectivités territoriales préfèrent majoritairement souscrire de tels contrats plutôt que d’assumer seules les conséquences financières d’un éventuel sinistre. Cependant, elles rencontrent de nombreuses difficultés, notamment dans la préparation des marchés publics, en raison d’une connaissance de leur patrimoine qui peut s’avérer incomplète et d’un manque d’expertise assurantielle pour définir leurs besoins de manière précise et adaptée aux contraintes des assureurs. Depuis les années 2022-2023, ces difficultés se sont également manifestées lors de la passation des contrats, avec des appels d’offres souvent infructueux ou des réponses assorties de conditions défavorables.
Dans son analyse concurrentielle, l’Autorité observe que ce secteur est caractérisé par une forte concentration autour de deux principaux acteurs, Groupama et SMACL Assurances SA, et que l’intensité concurrentielle y demeure faible. Par ailleurs, l’application parfois complexe des règles de la commande publique, combinée à de faibles perspectives de rentabilité, limite l’attractivité du secteur pour de nouveaux entrants. Ces facteurs contribuent à l’instauration de relations déséquilibrées entre les collectivités et les assureurs, rendant difficile la négociation de conditions favorables pour les premières.
Le présent avis s’attache à proposer des solutions susceptibles de dynamiser l’offre de ce secteur et, en particulier, à décrire les leviers à la disposition des collectivités pour animer la concurrence. L’Autorité formule, dès lors, sept recommandations consistant, soit à améliorer la préparation des marchés publics d’assurance (recommandations n° 1 à 3), soit à sécuriser la souscription des contrats d’assurance (recommandations n° 4 à 7) :
− recommandation n° 1 : l’Autorité recommande de renforcer la connaissance, par les collectivités territoriales, de leur patrimoine et de l’ensemble des risques auxquels elles sont confrontées. Une fois ces risques identifiés, il convient d’encourager les collectivités à prendre les mesures nécessaires pour prévenir leur survenance et/ou leurs conséquences ;
− recommandation n° 2 : l’Autorité invite les collectivités territoriales à se faire accompagner, si nécessaire, dans la préparation et le déroulement de la procédure de passation de leurs marchés d’assurance, en leur rappelant qu’elles peuvent avoir recours à des services partagés avec d’autres collectivités ou à des services d’assistance à la maîtrise d’ouvrage ;
− recommandation n° 3 : l’Autorité invite les collectivités territoriales à partager entre elles leurs retours d’expérience sur l’organisation concurrentielle des marchés d’assurance ;
− recommandation n° 4 : l’Autorité recommande de clarifier l’application du code de la commande publique aux marchés d’assurance des collectivités territoriales, par la formulation de consignes pratiques et juridiques claires à l’égard de ces dernières ;
− recommandation n° 5 : l’Autorité invite les collectivités territoriales à allonger les délais de réponses des assureurs à leurs appels d’offres ;
− recommandation n° 6 : l’Autorité invite les collectivités territoriales à procéder à un étalement du processus de mise en concurrence et à assurer la publicité la plus large et la plus précoce possible sur le calendrier de leurs appels d’offres ;
− recommandation n° 7 : l’Autorité recommande aux collectivités territoriales d’envisager systématiquement les possibilités d’allotissement avant de prendre les décisions relatives aux prochaines échéances de leurs contrats avec des opérateurs.