Transports

Mobilités : l’Autorité rend public son avis sur le fonctionnement concurrentiel du secteur des transports terrestres de personnes

Mobilités
Interview de Benoît Cœuré, Président de l'Autorité

La diversité, l’efficacité et le coût des transports terrestres de voyageurs sont des enjeux essentiels pour le bon fonctionnement du système productif et du marché du travail français, pour l’accès des Français à l’éducation, à la formation et à la santé et pour la cohésion sociale et territoriale. En outre, l’effort français de réduction des émissions de gaz à effet de serre repose de manière critique sur le secteur des transports, principal émetteur de ces gaz.

Constatant que le secteur a fortement évolué ces dernières années, notamment sous l’impulsion de nouvelles législations européennes, et que les transports ferroviaires conventionnés s’apprêtent à s’ouvrir à la concurrence, l’Autorité de la concurrence avait annoncé le 19 décembre 2022 s’être autosaisie pour avis afin de se livrer à un exercice inédit d’avis-bilan.

La réflexion de l’Autorité s’est nourrie des résultats d’une consultation publique qui a été menée du 3 au 31 mars 2023 (36 contributions) ainsi que de ses échanges avec l’ensemble des acteurs du secteur : l’Autorité de régulation des transports (ART), les ministères concernés, plusieurs régions et métropoles, SNCF Réseau, SNCF Gares & Connexions, l’Association française du rail, ou encore la Fédération nationale des associations d’usagers des transports (FNAUT). Son analyse s’est appuyée sur de nombreux rapports et documents publics, notamment ceux de l’ART, de la Cour des comptes, du Centre d’études et d’expertise sur les risques, la mobilité et l’aménagement (CEREMA), de l’Agence de la transition écologique (ADEME) et des ministères compétents.

L’Autorité rend aujourd’hui public son avis final.

Un bilan de ses recommandations passées et un diagnostic d’ensemble

Pour la première fois, l’Autorité s’intéresse de manière systématique à la mise en œuvre et aux effets de ses recommandations passées dans un secteur. Elle procède, par ailleurs, à une réactualisation de son analyse du paysage concurrentiel des secteurs concernés afin d’y intégrer deux dimensions supplémentaires - l’intermodalité et le développement durable - et de tenir compte des évolutions législatives et réglementaires.

Le document de 250 pages propose un diagnostic d’ensemble, selon le découpage suivant :

  • les marchés sur lesquels la concurrence s’exerce de manière permanente :
  • transports routiers interurbains librement organisés (« cars Macron »), transports ferroviaires librement organisés, transports publics particuliers de personnes (taxis et VTC) ;
  • les marchés sur lesquels la concurrence trouve à s’exercer lors des procédures d’appels d’offres : transports conventionnés urbains, routiers interurbains, et ferroviaires ;
  • les gares ferroviaires, routières et multimodales ;
  • la question de l’intermodalité.

Les nouvelles recommandations

Si l’Autorité adresse des recommandations spécifiques pour chaque marché, elle constate, de manière transversale, que la concurrence est non seulement un facteur de baisse des coûts, d’améliorationde la qualité et de la diversité de l’offre, mais joue aussi un rôle clé dans l’objectif de transition écologique du secteur. Que ce soit sur le marché des transports librement organisés ou sur le marché des transports conventionnés, la concurrence offre de nouveaux leviers au service d’une politique durable des transports.

  • Pour les marchés sur lesquels la concurrence peut s’exercer librement entre plusieurs opérateurs, les recommandations de l’Autorité ciblent un certain nombre de barrières à l’entrée devant être levées, ainsi que les facteurs susceptibles de favoriser le monopole historique ferroviaire face à ses concurrents.
  • Concernant les transports conventionnés, l’Autorité constate que la commande publique joue un rôle central dans le processus concurrentiel puisque les autorités organisatrices de la mobilité choisissent les attributaires des contrats au terme d’appels d’offres publics. S’agissant des transports urbains, l’Autorité observe que le secteur est marqué par une faible intensité concurrentielle. S’agissant des transports ferroviaires, elle relève qu’à compter du 25 décembre prochain, tout nouveau contrat d’exploitation d’un service de transport ferroviaire conventionné régional (actuellement exploité sous la marque TER par SNCF Voyageurs) devra faire l’objet d’une mise en concurrence. Au vu des enjeux concurrentiels attachés à ces procédures de mise en concurrence, l’Autorité formule des recommandations, sous la forme de bonnes pratiques à mettre en œuvre, à l’attention des collectivités territoriales afin qu’elles dynamisent la concurrence entre opérateurs lors des appels d’offres qu’elles organisent.
  • Concernant les gares, l’Autorité rappelle le caractère multimodal de ces installations et considère que l’ouverture à la concurrence du secteur impose de repenser le modèle des gares. Dès lors, l’Autorité invite les différentes parties prenantes et notamment les collectivités territoriales à s’emparer du sujet.
  • Enfin, pour accompagner la mutation du secteur des transports terrestres de personnes dans la transition écologique, l’Autorité recommande au législateur de modifier le code des transports, afin que l’ART puisse s’appuyer sur une base légale qui consacrerait plus nettement, dans le cadre de ses missions, la protection de l’environnement et le développement régional.
  • De manière générale, l’Autorité réaffirme son soutien au régulateur sectoriel dont le rôle est capital dans la réussite de l’ouverture à la concurrence et qui pourrait utilement voir ses moyens et prérogatives renforcés.
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