L’Autorité de la concurrence autorise, sous réserve de la cession de 11 magasins, le rachat de 200 magasins anciennement sous enseigne Casino par le groupe Intermarché

Casino Intermarché

L'essentiel

Le 8 février 2024, Intermarché a notifié à l’Autorité de la concurrence son projet d’acquisition de 200 magasins de distribution à dominante alimentaire sous enseigne du groupe Casino.[1]

Afin de tenir compte de la situation économique difficile des magasins, l’Autorité a accordé au groupe Intermarché, à sa demande, une dérogation à l’effet suspensif du contrôle des concentrations.[2] Conformément au régime applicable, cette dérogation, qui a permis à Intermarché de réaliser l’opération sans attendre la décision de l’Autorité, ne préjugeait en rien de la décision finale prise par l’Autorité, qui à l'issue de son instruction et de son analyse concurrentielle pouvait remettre en cause certaines des acquisitions en considérant que des remèdes seraient nécessaires dans les zones où la concurrence serait insuffisante pour les consommateurs après l’opération.

Après examen de l’opération de rachat, l’Autorité a finalement autorisé Intermarché à prendre le contrôle de ces points de vente sous réserve que onze magasins soient cédés à des enseignes concurrentes afin que les consommateurs puissent bénéficier d’alternatives suffisantes pour faire jouer la concurrence pour leurs achats de produits de grande consommation.

L’examen de cette opération porte sur des magasins autres que les 61 points de vente sous enseigne du groupe Casino dont le rachat par Intermarché avait été préalablement examiné et autorisé par l’Autorité le 11 janvier 2024, sous réserve de la cession de trois magasins qui a déjà donné lieu à des changements d’enseigne à Lons-le-Saunier (39), Plouaret (22) et Vals-près-le-Puy (43). Ces trois magasins ont été cédés au groupe Carrefour.[3]

Les parties à l'opération

Intermarché exploite différentes enseignes dans le secteur de la distribution à dominante alimentaire telles que Intermarché, Netto (maxi-discompte) et les Comptoirs de la Bio.

Intermarché et les magasins cibles sont actifs sur les marchés aval de la distribution à dominante alimentaire. Intermarché est également actif comme offreur, notamment à travers la filiale Agromousquetaires, et comme acheteur sur les marchés de l’approvisionnement en biens de consommation courante sur lesquels les magasins cibles sont également présents comme acheteurs.

L’Autorité a pu écarter tout problème de concurrence sur le marché de l’approvisionnement

L’Autorité a considéré que l’opération n’était pas susceptible de renforcer significativement la puissance d’achat d’Intermarché sur les marchés amont de l’approvisionnement en biens de consommation courante, compte tenu de la faible part d’achat des anciens magasins du groupe Casino acquis par Intermarché. L’Autorité a également constaté que cette opération n’était pas susceptible de placer les fournisseurs des parties en situation de dépendance économique[4].

Les risques d’atteinte à la concurrence au détriment des consommateurs locaux détectés dans onze zones locales

À l’issue de son analyse, l’Autorité a en revanche conclu que l’opération risquait d’entraver la concurrence sur le marché de la distribution au détail de produits à dominante alimentaire dans les zones de chalandise autour des anciens magasins du groupe Casino situés à Arc-lès-Gray (70), Bagnères-de-Luchon (17), Blanzac-lès-Matha (17), Boé (82), Charlieu (42), Lambesc (13), Lorgues (83), Revel (31), Solliès-Pont (83), Susville (38) et Valence-d’Agen (82).

En effet, l’Autorité a considéré que dans ces zones où Intermarché renforcerait significativement son pouvoir de marché à l’issue de l’opération, il ne demeurerait pas d’alternatives crédibles et suffisantes à Intermarché de nature à discipliner son comportement concurrentiel. Cette situation risquait notamment d’entraîner un appauvrissement de la diversité de l’offre au détriment des consommateurs dans les zones concernées.

Intermarché a proposé des engagements consistant en 11 cessions de magasins pour résoudre les problèmes de concurrence identifiés que l’Autorité a accepté

Afin de remédier à ces risques d’atteinte à la concurrence, Intermarché s’est engagé à céder, à un ou plusieurs concurrents, les magasins cibles ou, pour la zone de Lambesc, à son choix, un autre magasin de son groupe. Ces engagements permettront de garantir le maintien d’une concurrence suffisante et de protéger les intérêts des consommateurs sur les marchés concernés.

Les magasins concernés par les cessions sont les suivants :

Zone concernée Adresse Code postal Ville Enseigne avant l’opération
1 Arc-lès-Gray Avenue Charles Couyba 70100Arc-lès-Gray Arc-lès-Gray Hyper Casino
2 Bagnères-de-Luchon 43 avenue du Maréchal Foch 31110 Bagnères-de-Luchon Casino
3 Blanzac-lès-Matha 139 rue de Saint-Jean d'Angély 17160 Blanzac-lès-Matha Casino
4 Boé Route de Layrac 47550 Boé Casino Hyper Frais
5 Charlieu Chemin de la Montalay 42190 Charlieu Hyper Casino
6 Lambesc* 2 avenue Jean Monnet, ZAC Bertoire 13410 Lambesc Casino
Lambesc* 3 route d’Aix 13410 Lambesc Intermarché
7 Lorgues Avenue de Toulon 83510 Lorgues Casino
8 Revel Chemin des Bordes 31250 Revel Casino
9 Solliès-Pont Centre commercial Midi Multiple, 389 ZA des Plantades 83210 Solliès-Pont Casino
10 Susville ZI de Villaret La Mure 38350 Susville Casino
11 Valence-d’Agen 44/44 bis boulevard Victor Guilhem 82400 Valence-d’Agen Casino

* À Lambesc, la nouvelle entité s’est engagée à céder l’un des deux magasins visés à son choix.

L’Autorité veillera à la bonne réalisation des engagements permettant le maintien d’une concurrence efficace et la continuité de l’exploitation des magasins concernés

Les repreneurs présentés devront être agréés par l’Autorité, qui s’assurera qu’ils seront à même de constituer une offre alternative crédible en matière de distribution à dominante alimentaire, dans chacune de ces zones. L’Autorité sera vigilante à ce que l’acquéreur présente les compétences et les capacités financières adéquates pour exploiter de façon pérenne et développer l’activité des magasins cibles. Les cessions devront comprendre l’ensemble des éléments nécessaires au maintien de la viabilité de l’activité et intégrer le personnel employé dans les magasins concernés avant leur reprise par Intermarché.

Cession de magasins ne signifie pas fermeture des magasins, mais reprise avec changement d’enseigne afin d’écarter les risques de hausses de prix et/ou d’appauvrissement de l’offre au détriment du consommateur

Les engagements servent à maintenir un dynamisme suffisant de la concurrence au plan local.

Leur objectif est de permettre la reprise des magasins et de leur activité par une enseigne concurrente afin de maintenir l’animation concurrentielle dans la zone concernée et ainsi de garantir aux clients une offre diversifiée en prix et en produits. Le processus de cession de magasins fait l’objet d’un examen attentif par l’Autorité dans les mois qui suivent la décision autorisant l’opération. Le titulaire de l’autorisation doit proposer à l’Autorité des repreneurs qui sont aptes à assurer une reprise dans de bonnes conditions de validité, ces repreneurs devant ensuite exercer une concurrence effective. C’est au terme de l’examen de ces repreneurs qu’un agrément peut être délivré par l’Autorité, ce qui autorisera la cession effective du magasin en cause.

Ces cessions ne signifient donc pas fermeture des magasins, mais reprise avec changement d’enseigne.

Qu'est-ce que la dérogation à l’effet suspensif ?

Si la réalisation effective d'une opération de concentration ne peut intervenir qu'après l'accord de l'Autorité de la concurrence, dans certaines circonstances exceptionnelles, dûment motivées par les parties, l'Autorité peut octroyer une dérogation leur permettant de procéder à la réalisation effective de tout ou partie de l'opération sans attendre la décision d'autorisation et ce afin de permettre la poursuite de l’activité.

L'octroi d'une telle dérogation est exceptionnel. Une dérogation peut être accordée notamment dans le cas où l’entreprise acquise rencontre des difficultés, par exemple financières, importantes qui mettent en péril sa viabilité, comme c’était le cas en l’espèce.

L'octroi d'une dérogation par l'Autorité ne préjuge toutefois en rien de la décision finale prise à l'issue de l'instruction, l’Autorité pouvant imposer des remèdes (par exemple, cessions) voire interdire l’opération si celle-ci porte atteinte à la concurrence.

[1] Depuis la notification, plusieurs magasins cibles ont été, après que l’Autorité en a été informée par Intermarché, recédés au groupe Casino par Intermarché ou sortis du périmètre de reprise.

[2] Dérogation accordée en application de l’article L. 430-4 du code de commerce par lettre du 1e mars 2024.

[3] Décision de l’Autorité n° 24-DCC-02 du 11 janvier 2024.

[4] L’Autorité a ainsi noté que l’opération envisagée a été précédée, au cours de l’année 2024, par l’officialisation de nouvelles alliances entre Intermarché, Auchan et Casino. Les éventuels effets sur la concurrence découlant de ces alliances aux achats, qui relèvent des dispositions de l’article L. 420-1 du code de commerce, n’ont pas vocation à être analysés dans le cadre de l’examen de la présente concentration.

Contact(s)

Maxence Lepinoy
Chargé de communication, responsable des relations avec les médias
Virginie Guin
Directrice de la communication
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