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Liberté d’installation des avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation : l’Autorité rend son avis pour les années 2023-2025

Avocat

L’Autorité de la concurrence rend son avis au gouvernement sur la liberté d’installation des avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation pour les années 2023-2025 (4ème période d’application de la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques) et recommande la création de deux offices d’ici 2025.

L’essentiel

En application de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, qui prévoit un réexamen de la situation au moins tous les deux ans, l’Autorité a déterminé le nombre d’offices qu’il y a lieu de créer pour la période 2023-2025.

L’analyse menée s’est appuyée sur l’examen des évolutions possibles du contentieux devant les hautes juridictions, Conseil d’État et Cour de cassation, et de l’activité des professionnels actuellement en exercice. La situation financière des offices créés depuis 2017 confirme le constat du précédent avis de 2021, selon lequel le modèle économique des professionnels nouvellement installés leur a permis de réussir leur démarrage, sans bouleverser les conditions d’activité des offices existants.

À l’issue de son examen, l’Autorité recommande au vu des différents paramètres pris en compte et des objectifs poursuivis par la réforme, notamment de l’augmentation progressive du nombre des offices, la création de deux offices d’avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation [1] d’ici 2025, qui viendront s’ajouter aux dix offices déjà créés depuis 2017, portant le nombre total d’offices à 72. 

Calendrier

Cet avis de l’Autorité a fait l'objet d'une publication au Journal officiel le 22 avril 2023.

L’Autorité attire l’attention des candidats intéressés sur le fait que cette publication au JO fera courir le délai de deux mois au cours duquel les personnes intéressées peuvent déposer leur demande de nomination dans un office créé d’avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation [2].

Bilan de la mise en œuvre de la réforme

Après trois avis ayant conduit à la création de 4 offices [3] en 2016, 4 offices [4] en 2018 et 2 offices [5] en 2021 (portant le nombre total d’offices de 60 à 70), l’Autorité rend aujourd’hui un quatrième avis sur la liberté d’installation des avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation (« avocats aux Conseils »). Sur les 131 avocats aux Conseils que la profession compte aujourd’hui, treize se sont installés dans un office créé depuis la mise en œuvre de la réforme.

Dans son nouvel avis, l’Autorité dresse un bilan de la mise en œuvre de la réforme et établit un état des lieux actualisé des évolutions de la situation économique et sanitaire de l’offre et de la demande ayant une incidence sur cette profession.

Pour établir ce bilan, l’Autorité a notamment mené une consultation publique, conformément à l’article L. 462‑4‑2 du code de commerce, ouverte du 14 septembre au 14 octobre 2022.

Un potentiel de développement d’offices supplémentaires

L’analyse de l’offre et de la demande relatives à l’activité des avocats aux Conseils confirme la très bonne performance économique de la profession. L’impact de la crise sanitaire est certes perceptible, mais d’ampleur limitée. Sur la période 2017-2021, le taux de marge de la profession est demeuré stable et élevé, un peu au-dessus de 40 %, et le bénéfice moyen par avocat libéral s’est élevé à environ 470 000 euros. Cette situation, qui distingue la profession d’avocat aux Conseils des autres activités juridiques et judiciaires, s’explique notamment par la concentration du marché sur un faible nombre de professionnels qui bénéficient à la fois d’un monopole légal et d’une grande liberté en matière tarifaire et de gestion.

Par ailleurs, l’analyse de la situation financière des huit offices créés en 2017 et 2019 [6] indique que ces derniers semblent avoir réussi leur démarrage. Pour ces offices, le chiffre d’affaires moyen par avocat libéral a cru de 38 % entre 2019 et 2021, il dépasse 200 000 euros en 2021, et leur taux de marge est bien supérieur à celui de l’ensemble de la profession, autour de 60 %.

L’Autorité estime donc qu’il existe un potentiel de développement d’offices supplémentaires, sans que cela ne porte atteinte à la qualité des prestations rendues devant les juridictions de cassation, ni ne compromette la viabilité des offices existants.

L’Autorité recommande, en raison de l’existence de deux facteurs conjoncturels incertains, la création de deux offices d’avocats d’ici 2025

Deux facteurs principaux justifient une approche prudente en matière d’augmentation du nombre d’offices d’avocats aux Conseils :

  • premièrement, tandis que la demande de prestations des justiciables devant la Cour de cassation continue de baisser, les activités devant le Conseil d’État ont également entamé une diminution en 2022. Or, les avocats aux Conseils réalisent l’essentiel de leur activité (en volume et en chiffre d’affaires) devant ces juridictions suprêmes ;
  • deuxièmement, le vivier de professionnels titulaires du CAPAC susceptibles de se porter candidats à l’installation reste réduit, entre une dizaine et une quinzaine, mais il pourrait être en partie mobilisé pour compenser les potentiels départs en retraite (fin 2022, 17 avocats aux Conseils avaient 69 ans ou plus), ce qui limite les perspectives d’évolution du nombre d’avocats aux Conseils dans les deux années à venir.

Dans ce contexte, l’Autorité a retenu une approche prudente, en recommandant la création de deux offices d’ici 2025.

Les recommandations complémentaires

L’Autorité tient à saluer les efforts importants mis en œuvre par l’Ordre des avocats aux Conseils et la Chancellerie pour prendre en compte les recommandations qu’elle avait formulées dans ses précédents avis. Des modifications de textes et des évolutions à droit constant ont été réalisées afin :

  • d’améliorer la transparence et la fluidité relatives à la procédure de nomination au moment du dépôt des candidatures auprès de la Chancellerie et aux informations disponibles sur l’accès à la profession et ;
  • d’améliorer l’accès des femmes à la profession. L’Autorité salue à cet égard le fait que trois des cinq postes à responsabilité du conseil de l’Ordre sont aujourd’hui occupés par des femmes.

Toutefois, certaines mesures complémentaires pourraient permettre d’améliorer le dispositif régissant la liberté d’installation des avocats aux Conseils. Dans l’avis publié ce jour, l’Autorité émet ainsi de nouvelles recommandations poursuivant cinq principaux objectifs :

  • élargir le vivier de candidats potentiels en accroissant la communication sur les voies d’accès à la profession et en facilitant l’accès des professionnels travaillant déjà dans des offices ;
  • introduire davantage de transparence sur les critères de classement des candidats aux offices créés ;
  • actualiser l’information sur l’état des candidatures aux offices créés ;
  • faciliter le développement des offices créés, notamment en rendant l’attribution des charges collectives de la profession plus transparente, objective et équitable ;
  • améliorer la transmission d’informations à l’Autorité, notamment en mettant en application la plateforme qui permettra aux offices de disposer de statistiques précises sur leur activité devant la Cour de cassation.

 

[1] Les avocats aux Conseils sont titulaires d’un office attribué par l’État. Ils disposent d’un monopole de représentation des justiciables devant le Conseil d’État et la Cour de cassation pour les pourvois en cassation dans la plupart des matières, monopole qui représente environ 90 % de leur activité. Le reste se compose d’interventions devant d’autres juridictions (tribunaux administratifs, cours administratives d’appel, Conseil constitutionnel, Cour européenne des droits de l’homme, Cour de justice de l’Union européenne…) et de conseil juridique.

[2] Article 25 du décret n° 91-1125 du 28 octobre 1991 relatif aux conditions d’accès à la profession d’avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation.

[3] Consulter le premier avis n°16-A-18 du 10 octobre 2016 ainsi que le communiqué de presse.

[4] Consulter le deuxième avis n°18-A-11 du 25 octobre 2018 ainsi que le communiqué de presse.

[5] Consulter le troisième avis n°21-A-02 du 23 mars 2021 ainsi que le communiqué de presse.

[6] Les données relatives aux offices créés en 2021 sont insuffisantes à ce stade.

Contact(s)

Maxence Lepinoy
Maxence Lepinoy
Chargé de communication, responsable des relations avec les médias
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