Droits de diffusion des matchs du Championnat de football de Ligue 1 : le Conseil de la concurrence prononce des mesures conservatoires

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Le 18 novembre 2002, la société TPS a saisi le Conseil de la concurrence d’une plainte pour abus de position dominante et entente dirigée contre la Ligue de Football Professionnel (LFP) et les sociétés Canal Plus et Kiosque (ci-après dénommées Canal Plus).

Par une décision du 23 janvier 2003, le Conseil de la concurrence a prononcé des mesures conservatoires.

Il est rappelé qu’une décision de mesures conservatoires est une décision provisoire qui ne se substitue en aucun cas à la décision sur le fond - laquelle ne sera prise qu’au terme de l’instruction contradictoire et complète de l’affaire - et ne préjuge en rien de la solution qui sera finalement retenue.

Recevabilité de la saisine : le Conseil de la concurrence a constaté la présence d’éléments justifiant la poursuite de l’instruction

Lorsqu’une demande de mesures conservatoires est déposée auprès du Conseil de la concurrence, elle s’accompagne toujours, parallèlement, d’une saisine au fond relative aux pratiques dénoncées. Le Conseil se prononce d’abord sur la recevabilité de la saisine au fond, condition préalable à l’examen de la demande de mesures conservatoires et à leur éventuelle adoption.

Le Conseil a tout d’abord relevé que les compétitions de football à caractère régulier se distinguent par leur capacité à attirer et fidéliser les téléspectateurs de manière durable et que, dès lors, les droits de diffusion les concernant peuvent être considérés comme un marché distinct. Compte tenu des caractéristiques propres du championnat de France de Ligue 1, il n’a pas non plus exclu qu’il existe un marché plus étroit, se limitant aux droits de diffusion des matchs de ce championnat.

Il a, ensuite, considéré qu’il n’était pas exclu que la LFP soit en position dominante sur ces marchés des droits de retransmission du football, et que Canal Plus soit en position dominante sur celui de la télévision à péage.

Dans ce cadre, le Conseil a relevé un certain nombre de pratiques dont la licéité concurrentielle mérite un examen au fond. Il a notamment considéré qu’il ne pouvait être exclu, en l’état du dossier et à ce stade de l’instruction :

  • que les droits de diffusion des matchs du championnat de Ligue 1 constituent un produit essentiel pour l’activité des télévisions à péage ou, à tout le moins, un élément crucial pour leur développement et que leur attribution en exclusivité à Canal Plus, opérateur en position dominante sur le marché de la télévision à péage, puisse avoir des effets restrictifs de concurrence ;
  • que les incertitudes du règlement de la consultation sur la définition et la recevabilité des offres globales et sa mise en oeuvre aient pu avoir pour objet ou pour effet de créer une discrimination entre Canal Plus et TPS ;
  • que l’offre de Canal Plus, en position dominante sur le marché de la télévision à péage, combinant des valorisations faibles lot par lot et un prime d’exclusivité très élevée, puisse être considérée comme une offre d’éviction dirigée contre TPS ;
  • qu’il ait pu exister une concertation entre Canal Plus et la LFP afin de favoriser les offres de Canal Plus, compte tenu des liens contractuels entre Canal Plus et des clubs dont les présidents siègent au conseil d’administration de la LFP.

L’ensemble de ces éléments sera examiné lors de l’examen de la saisine au fond.

Des mesures conservatoires justifiées par une atteinte grave et immédiate à l’entreprise plaignante, au secteur concerné et à l’intérêt des consommateurs

  • Le Conseil a relevé que les abonnés et prospects des chaînes de télévision à péage tiennent compte des annonces de modification de contenu des programmes, pour déterminer leur choix en matière d’abonnement.

Le flux des abonnements et désabonnements étant permanent, il a, par conséquent, estimé que l’annonce de l’attribution de l’exclusivité des droits du championnat de Ligue 1 à Canal Plus, dès lors qu’elle serait considérée comme définitive par le public, portait une atteinte immédiate aux conditions de commercialisation des abonnements de TPS (acquisition de nouveaux abonnés et renouvellement d’abonnements).

Le Conseil a souligné à cet égard que le dommage engendré serait d’autant plus grave que la rigidité des mécanismes d’abonnement (durée annuelle, modalités de résiliation, contraintes techniques liées à un changement d’opérateur) rendront très difficilement réversibles les pertes d’abonnés enregistrées pendant cette période.

  • Le Conseil de la concurrence a également relevé le risque pour les consommateurs d’un retour à une situation d’exclusivité de Canal Plus pour la diffusion du Championnat de Ligue 1 : le financement d’une telle exclusivité pourrait se traduire par une augmentation du prix des abonnements, hypothèse que Canal Plus n’a pas écartée devant le Conseil.
  • Enfin, se référant à l’avis du CSA, le Conseil a relevé que la disparition de l’un des deux opérateurs de télévision par satellite aurait des conséquences importantes non seulement sur le marché concerné mais également sur plusieurs marchés aval et sur l’ensemble des offreurs de programmes, réduisant ainsi le choix des consommateurs.

Dispositif de mesures conservatoires

Le Conseil de la concurrence demande à la LFP et à Canal Plus et Kiosque de suspendre les effets de la décision d’attribution des droits de diffusion des matchs de football de Ligue 1, prise par le conseil d’administration de la LFP le 14 décembre 2002, jusqu’à l’intervention de la décision du Conseil de la concurrence sur le fond et, en conséquence, de s’abstenir de toute communication tendant à présenter la décision d’attribution de la LFP comme définitive et d’en faire toute utilisation publicitaire ou commerciale dans leur démarche de prospection de nouveaux abonnés.

 

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Yannick Le Dorze
Yannick Le Dorze
Adjoint à la directrice de la communication
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