Le Conseil de la concurrence rejette la demande de mesures conservatoires déposée par British Airways visant des pratiques d’Eurostar, de la SNCF et de France Rail Publicité

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Saisi le 18 novembre 2004 par British Airways d'une plainte pour entente et abus de position dominante mettant en cause Eurostar Group Ltd. (EGL), la SNCF et France Rail Publicité sur le marché, d'une part, du transport de personnes entre Paris et Londres et sur celui, d'autre part, de l'affichage publicitaire, le Conseil de la concurrence a estimé que l'octroi de mesures conservatoires n'était pas justifié en l'espèce et a partiellement rejeté la saisine au fond.

En ce qui concerne les pratiques tarifaires d'Eurostar, le Conseil rejette les mesures conservatoires mais poursuit l'instruction au fond.

Les pratiques de prédation dénoncées par British Airways

British Airways soutient qu'Eurostar, qui, selon elle, est en position dominante sur le marché du transport de personnes entre Paris et Londres, pratique des tarifs prédateurs afin de l'évincer du marché. Elle estime aussi que ces tarifs sont permis par les subventions versées par la SNCF, en position de monopole sur le réseau ferroviaire français, et perturbent durablement les conditions de concurrence sur la route Paris-Londres.

A titre conservatoire, la société demandait qu'il soit fait injonction à Eurostar et à la SNCF de cesser leurs campagnes publicitaires sur les offres tarifaires de l'Eurostar ainsi que sur les offres promotionnelles existantes.

L'analyse du Conseil : rejet de la demande de mesures conservatoires

Le Conseil estime qu'il n'est pas exclu qu'Eurostar soit en position dominante sur le marché du transport de personnes sur la route Paris-Londres où avion et train sont substituables pour une clientèle tant d'affaires que d'agrément.

Il a considéré qu'il n'était pas démontré, en l'état de l'instruction, que les tarifs d'EGL étaient prédateurs. Seule une instruction au fond pourrait apporter une réponse aux questions qui restent posées sur le caractère fixe ou variable de certains coûts et sur le lien entre capacités mises en place et rentabilité de l'Eurostar.

En tout état de cause, les pratiques ne paraissent pas suffisamment caractérisées pour pouvoir constituer la cause directe et certaine d'une quelconque atteinte à l'économie générale, à celle du secteur intéressé, à l'intérêt du consommateur ou à l'entreprise plaignante et justifier donc, de ce fait, l'octroi de mesures conservatoires.

Le Conseil rejette donc les mesures conservatoires mais poursuit l'instruction au fond afin d'évaluer le caractère éventuellement prédateur des tarifs d'Eurostar.

En ce qui concerne les pratiques de refus d'affichage publicitaire au sein du réseau ferroviaire, le Conseil rejette la saisine

La saisine de British Airways

British Airways contestait le refus de France Rail Publicité, opposé à deux reprises, d'afficher ses campagnes de publicité en gare du Nord. Elle soutient que cette attitude est constitutive, à la fois, d'un abus de position dominante sur le marché de la fourniture de l'affichage publicitaire sur le domaine public ferroviaire, et d'une entente anticoncurrentielle entre France Rail Publicité et la SNCF.

British Airways faisait valoir que les espaces publicitaires du réseau ferroviaire présentent une spécificité par rapport à d'autres modes d'affichage publicitaire extérieur et constituent un marché pertinent, sur lequel France Rail Publicité est le seul offreur. Par ailleurs, elle notait qu'en gare du Nord se trouve son cœur de clientèle puisque 65 % des passagers qui voyagent entre Paris et Londres utilisent les services d'Eurostar. Le refus de France Rail Publicité l'avait ainsi contrainte à mettre en place d'autres solutions ciblées sur cette clientèle, mais plus coûteuses.

L'analyse du Conseil : rejet de la demande de mesures conservatoires et de la saisine au fond

Conformément à sa jurisprudence en matière de délimitation des marchés dans le secteur de la publicité, le Conseil ne juge pas nécessaire de distinguer l'affichage sur le domaine public ferroviaire des autres supports d'affichage extérieur. Sur ce marché plus large, France Rail Publicité ne détient pas de position dominante. En 2003, elle détenait moins de 5 % du marché de l'affichage extérieur, et son activité en gare représentait environ 2,5 % de ce marché.

Le fait que l'affichage dans les gares puisse, du point de vue d'un annonceur, constituer un support moins coûteux pour une campagne particulière, comme ce pourrait être le cas s'agissant de la gare du Nord pour la campagne British Airways, est insuffisant pour fonder une délimitation du marché réduite à ce seul support.

Concernant le grief d'entente avancé par British Airways, le Conseil considère qu'un accord entre la SNCF et France Rail Publicité sur ce refus d'affichage, à le supposer établi, n'aurait pas d'objet anticoncurrentiel mais viserait seulement à protéger les intérêts légitimes de la SNCF. De plus, la part très faible détenue par France Rail Publicité sur le marché de l'affichage extérieur ne permet pas à un refus opposé à un annonceur potentiel, fut-il concerté avec la SNCF, d'avoir un quelconque effet anticoncurrentiel sur le marché concerné. L'absence d'effet, fut-il potentiel, sur un marché, d'accords conclus entre des entreprises détenant une très faible part de marché a d'ailleurs été reconnu, en droit communautaire et en droit national (communication de minimis de la Commission européenne et ordonnance du 25 mars 2004, intégrée dans le code de commerce).

La saisine, en ce qu'elle portait sur les pratiques de refus d'affichage a été rejetée pour défaut d'éléments suffisamment probants. La demande de mesures conservatoires qui lui était associée a, par voie de conséquence, également été rejetée.

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Yannick Le Dorze
Yannick Le Dorze
Adjoint à la directrice de la communication
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