Le processus d’ouverture progressive de la profession notariale donne des résultats encourageants et doit se poursuivre.

En application de la « loi Macron », l’Autorité formule de nouvelles recommandations pour favoriser, de manière graduelle, l’installation de nouveaux notaires.

L’Autorité identifie 230 zones d’installation libre sur 306 zones du territoire et y recommande l’installation libérale de 700 nouveaux notaires d’ici 2020.

En application de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (« loi Macron »), l’Autorité de la concurrence a proposé ce jour aux ministres de la justice et de l’économie une carte révisée des zones d’installation des notaires, assortie de recommandations sur le rythme de création de nouveaux offices notariaux pour la période 2018-2020. La loi prévoit en effet qu’une révision de cette carte intervienne tous les deux ans.
Pour mémoire, la première carte, qui avait été adoptée sur proposition de l’Autorité du 9 juin 2016 (avis n° 16-A-13) par arrêté conjoint des ministres de l’économie et de la justice du 16 septembre 2016 (publié au Journal Officiel du 20), arrivera à échéance le 21 septembre prochain.

Le premier objectif de 1650 nouveaux notaires, fixé dans la carte de 2016, pas encore mais presque atteint

La carte 2016-2018 identifiait 60 zones d’installation contrôlée (« zones orange ») et 247 zones d’installation libre (« zones vertes »). Dans ces dernières, l’Autorité avait recommandé l’installation libérale de 1 650 notaires. En pratique, malgré l’engouement des candidats (plus de 36 000 candidatures enregistrées sur le site internet dédié OPM) et la mobilisation exceptionnelle des services de la Chancellerie pour instruire les demandes, la longueur et la complexité de la procédure de nomination ont été telles qu’il est d’ores et déjà établi que cet objectif ne sera pas atteint en septembre 2018 (quelques dizaines de nominations feront défaut).

Des effectifs plus jeunes et féminisés

L’Autorité salue néanmoins le franchissement de la première étape du processus de rééquilibrage progressif de l’offre et de la demande de services notariaux souhaité par le législateur. Grâce à la réforme, les effectifs de notaires titulaires ou associés d’offices auront crû d’environ 15 % en deux ans, tout en contribuant à la féminisation (plus de la moitié des nouveaux notaires nommés sont des femmes) et au rajeunissement de la profession (la moyenne d’âge des nouveaux notaires nommés est de 37 ans, contribuant à baisser de deux ans la moyenne d’âge de la profession qui s’établit désormais à 47 ans).

L’Autorité recommande la nomination de 700 nouveaux notaires libéraux pour la période 2018-2020

L’Autorité estime que le potentiel à l’horizon 2024 est compris entre 1 800 et 2 300 installations de nouveaux notaires libéraux. Pour atteindre cette cible, tout en respectant l’impératif de progressivité prévu par le législateur, l’Autorité a procédé à un lissage linéaire des recommandations entre 2018 et 2024. Pour la période 2018-2020, une fois les recommandations 2016-2018 satisfaites, l’Autorité recommande l’installation libérale de 700 nouveaux notaires répartis dans 230 zones d’installation, proportionnellement aux besoins identifiés localement. Elle a également défini 76 zones orange, dans lesquelles elle n’a pas identifié de besoin de création d’offices a priori. La réduction du nombre de zones vertes (230 contre 247 dans la précédente carte) matérialise le rééquilibrage en cours de l’offre notariale aux besoins de l’économie dans une part croissante du territoire national.
La garde des Sceaux, ministre de la Justice, étant la garante de la liberté d’installation des notaires, l’Autorité assortit sa proposition de carte de six séries de recommandations visant à améliorer la mise en œuvre de la réforme.
 

I- UNE DEUXIEME ÉTAPE DANS L’APPLICATION DES DISPOSITIONS DE LA « LOI MACRON »


1- Le cadre législatif et réglementaire


Officiers publics et ministériels, les notaires sont nommés par le garde des Sceaux dans un office existant, vacant ou créé. La loi Macron a introduit un principe de liberté d’installation régulée, afin d’abaisser les barrières à l’entrée de la profession et d’adapter le maillage territorial aux besoins de l’économie.

Dans le cadre de ce dispositif, la mission de l’Autorité1 consiste à proposer au Gouvernement, tous les deux ans, une carte2 qui identifie des zones où l’installation des notaires est libre (« zones vertes »)3 et des zones où l’installation des notaires est contrôlée (« zones orange »)4.

La première carte a été proposée par l’Autorité dans le cadre de l’avis n° 16-A-13 du 9 juin 2016. Suivant sa proposition, l’arrêté conjoint du 16 septembre 2016 a établi 247 zones d’installation libre (sur un total de 307 zones) dans lesquelles 1 650 nouveaux notaires libéraux étaient appelés à s’installer entre septembre 2016 et septembre 2018.


2- État des lieux de l’offre et bilan des créations d’offices


Avant de formuler de nouvelles recommandations pour la période 2018-2020, l’Autorité a procédé à un état des lieux de l’offre et de l’implantation notariale. Comme dans son précédent avis, elle constate :
 

• Un maillage territorial fort dans les territoires ruraux, mais un déficit d’offre dans les zones densément peuplées, qui comptent certes le plus de notaires libéraux en valeur absolue, mais se situent en-dessous de la médiane s’agissant de la densité notariale (14,6 notaires libéraux pour 100 000 habitants) ; en procédant à une évaluation prospective des effets des créations d’offices sur l’offre et l’implantation notariales dans l’hypothèse prudente5 où, selon ses recommandations, 1 650 nouveaux titulaires ou associés seraient nommés dans des offices créés d’ici la fin de validité de la première carte, l’Autorité anticipe un renforcement de cette densité notariale (en 2018, la médiane passerait de 14,6 à 16,4 notaires libéraux par zone d’installation).

• Un taux de marge élevé, y compris dans les zones les moins dynamiques : 80 % des offices présentent un taux de marge supérieur à 19 % et pour 50 % des offices ce taux dépasse 27 % ; sur la base de la même évaluation prospective, elle prévoit une modération du chiffre d’affaires moyen par notaire libéral (la médiane des zones passerait à 550 000 euros en 2018, contre 669 000 euros sur la période 2012-2016).

• Une plus grande hétérogénéité du chiffre d’affaires et des revenus sur le territoire que du nombre moyen d’actes : il existe ainsi une forte disparité entre des études qui sont très rentables, situées en zone verte, et des études qui le sont moins, situées en zone orange.

• Un nombre d’offices en hausse de 30 % sur la période 2016-2018 contre une quasi-stagnation depuis 10 ans

L’Autorité a relevé que malgré les lourdeurs de la procédure de candidature et de nomination (tirage au sort manuel, nombre de candidatures illimité, manque de transparence, etc.), le nombre d’offices a crû d’au moins 30 % sur cette période (celui des notaires libéraux d’environ 15 %), alors qu’il était en quasi-stagnation depuis une décennie (+1,42 % sur la période 2005-2015).

• Un plus grand choix pour le client et de meilleurs débouchés pour les notaires diplômés

D’un point de vue qualitatif, ces arrivées de nouveaux professionnels libéraux ont un effet bénéfique sur l’offre notariale, avec un plus grand choix pour les clients et une proximité accrue entre ces derniers et leur notaire, mais également la création de débouchés professionnels pour les notaires diplômés qui exerçaient jusqu’à présent en tant que notaires salariés ou assistants, et qui peuvent désormais accéder plus aisément à l’exercice libéral de leur profession.


II- LES RECOMMANDATIONS QUANTITATIVES DE L’AUTORITE POUR LA PÉRIODE 2018-2020 :  700 NOUVEAUX NOTAIRES


Pour ses travaux de révision de la carte, l’Autorité a décidé de reconduire la méthodologie suivie pour l’élaboration de la première carte, celle-ci ayant été validée en tous points par le Conseil d’État (décision du 16 octobre 2017).

En appliquant cette méthode à des données actualisées, concernant le chiffre d’affaires et les effectifs de la profession notamment, et en raisonnant à partir de la situation où, à la date d’échéance de la première carte, les 1 650 nominations prévues par l’arrêté du 16 septembre 2016 seraient effectives (approche protectrice), l’Autorité estime que le potentiel à l’horizon 2024 est compris entre 1 800 et 2 300 nouveaux notaires libéraux.

Pour atteindre cette cible, tout en respectant l’impératif de progressivité prévu par la loi, l’Autorité a procédé à un lissage linéaire des recommandations entre 2018 et 2024, ce qui l’amène à proposer la création d’offices supplémentaires permettant l’installation libérale de 700 nouveaux notaires répartis sur 230 zones d’installation (sur un total de 3066) proportionnellement aux besoins identifiés localement. Il conviendra d’ajouter à ces créations le reliquat des recommandations non satisfaites sur la période 2016-2018.


Au vu de ce qui précède,  l’Autorité propose la carte révisée suivante :


 
*En application de l’exception prévue au VII de l’article 52 de la loi du 6 août 2015.



III- LES RECOMMANDATIONS QUALITATIVES DE L’AUTORITÉ

Pour assurer le succès de la réforme et comme le législateur l’a souhaité, l’Autorité formule enfin au Gouvernement six séries de recommandations visant à :

1) prévoir un régime transitoire entre deux cartes afin de s’assurer que les nominations éventuellement restantes soient effectuées, même si la carte précédente est arrivée à échéance. Il est par exemple proposé d’annuler la disposition réglementaire qui prévoit que l’adoption d’une nouvelle carte rend caduques les demandes formées antérieurement par les candidats.

2) améliorer la procédure de nomination en zone orange en introduisant le principe par défaut de l’interdiction de  toute création d’office dans ces zones, sauf situation exceptionnelle qui justifierait, après avis de l’Autorité, que le ministre de la Justice déroge à cette interdiction. Une telle modification du dispositif actuel prendrait acte du fait que le Gouvernement a choisi de ne procéder à aucune création d’office dans les zones orange sur la période 2016-20187.

3) améliorer la procédure de nomination en zone verte, notamment en limitant les candidatures par zone à une par personne physique et en fixant un nombre maximal de zones de candidature (par exemple trois par jour), en permettant aux candidats d’exprimer un ordre de préférence entre leurs différentes demandes, mais aussi en organisant un tirage au sort électronique et simultané dans toutes les zones, en accroissant la transparence sur l’état d’avancement de l’instruction des candidatures, en allongeant le délai maximum entre nomination et prestation de serment et en restreignant les possibilités de renonciation tardive des candidats.

4) abaisser des barrières à l’entrée pour les candidats à l’installation en assouplissant les règles en matière de communication destinée à la clientèle des offices et de remises tarifaires.

5) améliorer le dispositif d’élaboration de la cartographie en associant l’Autorité à l’élaboration du rapport prévu au VII de l’article 52 de la loi du 6 août 2015 sur l’opportunité d’étendre l’application de la liberté d’installation aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, en élaborant un cadre de transmission systématique d’information à l’Autorité et en imposant une ventilation des produits et des charges entre l’office principal et son (ou ses) bureau(x) annexe(s).

6) améliorer l’accès des femmes et des jeunes aux offices par l’extension à la profession de notaire du dispositif prévu par l’ordonnance n° 2015-949 du 31 juillet 2015 relative à l’égal accès des hommes et des femmes au sein des ordres professionnels, la mise à disposition de statistiques par sexe, la facilitation de l’articulation entre la vie privée et la vie professionnelle des notaires (système de « notaire remplaçant » lors des congés maternité ou paternité), l’adoption rapide de mesures budgétaires pour assurer le financement du fonds interprofessionnel de l’accès au droit et à la justice (chargé notamment d’octroyer des aides à l’installation dans certaines zones du territoire) et l’intégration des « jeunes » créateurs dans les diverses instances de la profession.


 

1 Article L. 462-4-1 du code de commerce, et article 52 de la loi Macron.

2Les zones concernées recouvrent l’ensemble des départements de métropole, à l’exception de ceux du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. En outremer, les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique, de La Réunion et de Mayotte sont tous concernés, ainsi que les collectivités de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon. 

3Dans les zones « où l’implantation d’offices apparaît utile pour renforcer la proximité ou l’offre de services », les demandes des candidats à l’installation remplissant les conditions prévues ont vocation à être acceptées, dans la limite du rythme de création recommandé.

4Dans les zones où aucun besoin de création n’a été identifié a priori, le ministre de la Justice ne peut refuser une demande de nomination dans un nouvel office que si elle est susceptible de « porter atteinte à la continuité de l’exploitation des offices existants et à compromettre la qualité du service rendu ». Le refus ministériel est motivé. Il intervient après un avis de l’Autorité de la concurrence rendu public.

5Les installations étant appelées à être moins nombreuses que 1 650 au total, leur impact réel sera nécessairement inférieur à ces estimations.


6Contrairement à l’avis n° 16-A-13, Wallis-et-Futuna ne constitue plus une « zone d’installation » au sens du présent avis.

 7À l’exception d’une création d’office dans la zone de Saint-Pierre-et-Miquelon dans le contexte particulier d’une réforme de l’organisation du notariat sur ce territoire (décret n° 2017-711 du 2 mai 2017 relatif au notariat à Saint-Pierre-et-Miquelon).

> Pour accéder au tableau établissant par zone le nombre de nouveaux notaires.
 

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Virginie Guin
Virginie Guin
Directrice de la communication
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