Transports

L'Autorité rend son avis sur le transport longue distance régulier par autocar

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Après avoir interrogé les acteurs du secteur et analysé le fonctionnement du marché des transports de voyageurs par autocar, l’Autorité de la concurrence rend public son avis.

Elle préconise l’ouverture plus large de ce marché et recommande notamment que soit mis en place un cadre réglementaire plus clair et plus simple afin de faire bénéficier les consommateurs de ce mode de transport pratique et économique.

L’Autorité de la concurrence rend publiques aujourd’hui les conclusions de la grande enquête sectorielle qu’elle a menée durant un an concernant le fonctionnement concurrentiel du marché du transport interrégional par autocar.

Dans le cadre de l’instruction de cet avis, l’Autorité a consulté de nombreux acteurs du marché, des autorités organisatrices de transport ainsi que des représentants des usagers. Elle a notamment mené une consultation publique (du 13 novembre au 24 décembre 2013), qui lui a permis d’enrichir ses premières pistes de recommandations (voir le communiqué de presse du 13 novembre 2013).

L’AUTOCAR : UN MODE DE TRANSPORT ÉCONOMIQUE ET PERFORMANT, DONT LE DÉVELOPPEMENT EST ENTRAVÉ PAR LES CONTRAINTES RÉGLEMENTAIRES ACTUELLES


 De nombreuses conditions sont réunies pour que les services de transport par autocar sur longue distance se développent en France : qualité du réseau routier français, existence d’une demande potentielle et intérêt des entreprises de transport pour ce marché (Eurolines, iDBUS, Stagecoach, Réunir, etc).

Un mode de transport complémentaire du train, pour mieux se déplacer sur tout le territoire 

Le développement de l’offre de transport par autocar peut se faire à l’avantage des consommateurs et contribuer à faire croître la demande globale de transport en France. Tout d’abord, il peut permettre de se déplacer davantage, grâce à un réseau plus étendu que le réseau ferroviaire, offrant de nouvelles dessertes de villes. De plus, il élargit la demande de transport en ouvrant l’accès au voyage à des consommateurs qui n’ont pas les moyens de se déplacer (étudiants, séniors, personnes à faible revenu, etc.). Enfin, il permet à d’autres consommateurs de voyager à moindre coût et d’opérer ainsi un transfert de pouvoir d’achat.

Le développement du transport par autocar pourrait permettre en définitive de mieux se déplacer sur le territoire, dans des conditions d’accueil et de confort modernes, en diversifiant l’offre de transport et en resserrant le maillage du réseau de transport collectif terrestre. L’autocar et le train sont, à cet égard, et de manière générale, plus complémentaires que concurrents. Le développement de l’autocar devrait permettre en outre des créations d’emplois, sans effets adverses sur l’environnement. (voir Fiche N° 2 – Les avantages du transport interrégional par autocar).


Des contraintes commerciales, pratiques et juridiques disproportionnées, doublées d’un accès difficile aux gares routières

Bien qu’il présente de nombreux avantages, le transport interrégional par autocar occupe encore une très faible part du transport de voyageurs en France (environ 110 000 voyageurs en 2013, soit 0,0005% du nombre total de voyages longue distance), principalement en raison des contraintes réglementaires qui en grèvent l’efficacité. A titre de comparaison, dans des pays où le marché du transport par autocar est ouvert plus largement, comme la Grande-Bretagne ou la Suède, ce mode représente respectivement 4 % et 5 % des voyages de longue distance. (voir Fiche N°3 - Le cadre réglementaire actuel : le cabotage et Fiche N°4 - Comparaisons européennes)

En effet, le régime de « cabotage » sur ligne internationale – qui est le seul ouvert en France – crée d’importantes contraintes commerciales, pratiques et juridiques pour les opérateurs sur le marché. Par ailleurs, l’objectif poursuivi lors de l’examen d’une éventuelle « atteinte à l’équilibre économique d’une ligne conventionnée » n’est pas défini, pas plus que les critères retenus. En pratique, les régions se sont massivement opposées, sans fournir d’analyse détaillée, à l’ouverture de lignes routières, ce que le service autorisateur (le Ministère des transports) n’a pas souhaité remettre en question. Enfin, l’accès aux gares routières est rendu difficile par des situations très différentes et des règles peu transparentes en fonction des gares

Ces constats établis par l’Autorité de la concurrence, qui ont été confirmés par les contributions reçues dans le cadre de la consultation publique, la conduisent à réaffirmer l’intérêt d’une ouverture plus large du marché du transport régulier interrégional par autocar.

L’AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE FORMULE DES RECOMMANDATIONS POUR OUVRIR LES SERVICES D’AUTOCAR ET RÉNOVER LA RÉGLEMENTATION


L’Autorité de la concurrence recommande que soit mis en place un cadre réglementaire plus ouvert, plus transparent et plus simple. Les recommandations de l’Autorité sont donc orientées vers les mesures visant à la refonte de ce cadre réglementaire (voir Fiche N°1 - Synthèse des recommandations de l’Autorité).

1) Simplifier et raccourcir la procédure d’accès au marché

Les délais d’autorisation et le défaut de transparence du système actuel sont un frein important au développement efficace du marché du transport par autocar. Si le contrôle d’une possible atteinte à des offres conventionnées préexistantes (services ferroviaires TER ou TET notamment) n’est pas illégitime – dans la mesure où il peut répondre à des préoccupations de politique publique telles que le financement de liaisons non rentables ou la garantie qu’elles continueront d’être assurées – ses modalités doivent être revues.

A. Abandonner les contraintes du cabotage sur les lignes internationales

L’Autorité recommande tout d’abord d’abandonner les contraintes du cabotage sur lignes internationales et de prévoir un cadre national qui concilie le développement du transport par autocar longue distance d’initiative privée et la préservation d’offres répondant à des besoins de service public.

B. Mettre en place un régime d’autorisation de plein droit pour les liaisons de plus de 200 km

L’Autorité recommande un régime d’autorisation de plein droit pour les liaisons de plus de 200 kilomètres. En effet, sur les trajets de plus de 200 km, l’absence de concurrence entre les modes routier et ferroviaire ne justifie pas qu’un test d’atteinte à l’équilibre économique de services conventionnés soit systématiquement mené.

C. Clarifier le test d’atteinte à l’équilibre économique des lignes conventionnées pour les liaisons de moins de 200 km

Pour les liaisons de moins de 200 km le test d’atteinte à l’équilibre économique reste pertinent. Les autorités organisatrices concernées auraient un délai de deux mois suivant la déclaration d’un nouveau service d’autocar pour émettre un avis d’opposition motivé. La réception d’un tel avis ferait alors débuter un second délai de deux mois, nécessaire à l’examen du risque invoqué d’atteinte à l’équilibre économique de services conventionnés préexistants. (voir § 368 à 380 de l’avis)

Par ailleurs, l’Autorité préconise d’opérer alors un test clarifié, en trois étapes :

1°) vérifier la préexistence d’une offre conventionnée ;

2°) démontrer une concurrence possible entre le service d’autocar et le service conventionné,

3°) mettre en évidence une atteinte à la viabilité de la ligne conventionnée (reports de clientèle et atteinte financière).


Renforcer les obligations de fourniture de données aux autorités organisatrices de transports (départements, régions, Etat)

Pour pouvoir apporter la preuve de telles atteintes à l’équilibre économique, il convient que les autorités organisatrices de transports disposent de toutes les données pertinentes qui en permettent le calcul (fréquentation, recettes et charges). Or l’enquête a montré des carences importantes en matière d’accès à ces données, concernant notamment les offres ferroviaires comme les TER exploités par la SNCF. L’Autorité recommande donc que les obligations de fourniture des données de transports aux autorités organisatrices (départements, régions, Etat) par les exploitants conventionnés soient renforcées.

Ces préconisations, tendant à simplifier, alléger et raccourcir la procédure d’accès au marché, peuvent dynamiser l’offre de transport aux voyageurs, favoriser l’investissement des autocaristes, éclairer les autorités organisatrices sur leurs besoins de transport et protéger les offres répondant à des besoins de service public.


Ouvrir les liaisons infrarégionales sous contrôle des régions


Par ailleurs, une ouverture des services sur des liaisons infrarégionales est également souhaitable. Les régions devraient se voir confier le rôle de service autorisateur pour ces liaisons.

2) Clarifier les modalités d’accès aux gares routières et refondre leur cadre réglementaire

L’Autorité de la concurrence recommande par ailleurs une action concernant les gares routières de voyageurs. Le cadre réglementaire, résultant notamment d’une ordonnance datant de 1945, et la diversité des modes d’intervention des différentes collectivités territoriales conduisent à une offre de gares routières limitée et hétérogène. Bien souvent, les autocaristes peinent ne serait-ce qu’à identifier les interlocuteurs pertinents. De plus, les modalités techniques et financières de l’accès à ces infrastructures sont extrêmement variables.

Garantir un traitement équitable et non discriminatoire des autocaristes

A court terme, un recensement des principales gares routières ainsi qu’une collecte et une centralisation des coordonnées des entités responsables est souhaitable. Des garanties de traitement équitable et non discriminatoire des autocaristes devront ainsi être mises en place.

A plus long terme, une refonte du cadre réglementaire des gares routières est recommandée, tendant à clarifier les responsabilités des collectivités, à redéfinir les différents types d’équipements et à y associer des règles techniques et tarifaires d’accès unifiées et transparentes.

3) Mettre en place une autorité administrative indépendante en charge d’une régulation sectorielle multimodale intégrée (transports ferroviaire et routier)

Cette autorité indépendante, dont les compétences seraient plus larges que celles confiées à l’Autorité de régulation ferroviaire (ARAF), qui pourrait être le socle du futur régulateur, serait notamment la mieux à même d’apprécier le degré de concurrence intermodale entre le rail et la route, de concilier les offres privées et les offres de service public, en apportant des garanties d’impartialité renforcées.

Elle pourrait également participer à la collecte et la centralisation des données de transport, cruciales pour les décideurs publics.


Impliquer l’autorité de régulation multimodale sur la question des gares routières


L’autorité de régulation multimodale devrait également être impliquée sur la question des gares routières : par un pouvoir de règlement des différends entre gestionnaires de gares et transporteurs d’une part, et par des pouvoirs d’avis et de réglementation tendant à clarifier et unifier les règles techniques et tarifaires applicables aux autocaristes, d’autre part

Consulter le dossier de presse

Fiche N°1 - Synthèse des recommandations de l’Autorité
Fiche N°2 - Les avantages du transport interrégional par autocar
Fiche N°3 - Le cadre réglementaire actuel : le cabotage
Fiche N°4 - Comparaisons européennes

Contact(s)

Yannick Le Dorze
Yannick Le Dorze
Adjoint à la directrice de la communication
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