L'Autorité sanctionne six fabricants d'électroménager, parmi les plus importants du secteur, à hauteur de 189 M€ pour s'être, notamment, concertés sur des hausses de prix

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L'essentiel

À la suite d'indices transmis par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et d'éléments recueillis lors d'opérations de visites et saisie réalisées par l'Autorité de la concurrence aux sièges des entreprises (notes manuscrites, diaporamas, documents, tableaux), l'Autorité sanctionne 6 fabricants d'électroménager, parmi les principaux en France1, BSH, Candy Hoover, Electrolux, Indesit2, Whirlpool et Eberhardt Frères (distributeur de la marque Liebherr) pour s'être concertés à deux reprises, entre 2006 et 2009 (avec une période de suspension entre janvier 2007 et mai 2008), lors de réunions secrètes, sur les hausses des prix de vente conseillés (entente horizontale). Elle sanctionne également les fabricants pour s'être mis d'accord entre mai et septembre 2009 sur une modification des conditions commerciales appliquées aux cuisinistes pour les modèles d'exposition.

De nombreuses marques sont concernées :

Fabricant Marques
BSH Bosch, Siemens, Viva, Neff
Candy Hoover Candy, Hoover, Rosières
Eberhardt Frères Liebherr
Electrolux Electrolux, Arthur Martin, AEG
Indesit Indesit, Ariston, Scholtes
Whirlpool Whirlpool

Les entreprises en cause n'ont pas contesté les faits et ont bénéficié à ce titre d'une réduction de sanction dans le cadre d'une procédure de transaction. Par ailleurs, BSH, qui a sollicité la procédure de clémence3 et apporté des éléments complémentaires à l'Autorité, a bénéficié, en tant que demandeur de clémence, d'une réduction d'amende supplémentaire au titre de sa contribution à l'instruction.

Les produits d'électroménager concernés

Les produits concernés regroupent les principaux produits de gros électroménager, communément appelés « produits blancs » : réfrigérateurs, congélateurs, lave-linge, sèche-linge, lave-vaisselle, tables de cuisson, cuisinières, qu'ils soient encastrables ou en pose libre, commercialisés dans les grandes surfaces spécialisées, les magasins de proximité, les grandes surfaces alimentaires, en vente à distance ou encore par les cuisinistes.
 

Les fabricants fixaient en commun des « règles de prix » 

Dans ce secteur, l'usage est que les fabricants communiquent à leurs distributeurs des « prix de vente conseillés » pour la vente au détail. Ces indications correspondent au positionnement prix qu'ils recommandent pour la vente de leurs produits aux consommateurs. Les prix de vente conseillés, qui sont le plus souvent situés à des « seuils psychologiques » sont particulièrement sensibles pour les références les plus vendues, parmi lesquelles celles d'entrée de gamme. Fixés à des montants en dessous de chiffres ronds (comme 499 euros pour un lave-linge par exemple), et dénommés « pics prix » par les acteurs du secteur, ces prix ont une importance particulière, dans la mesure où les quantités vendues peuvent être très importantes. 

Entre septembre 2006 et janvier 2007, puis entre fin mai 2008 et avril 2009, les fabricants se sont réunis à plusieurs reprises pour discuter des hausses à appliquer à ces prix de vente conseillés et arrêter des « règles de prix ». 

À titre d'exemple, en 2008, la règle de hausse de prix décidée consistait notamment à appliquer les évolutions suivantes pour certains produits :

- pour les produits dont le prix de vente conseillé est inférieur à 200 euros : une hausse de 20 euros ; 
- pour les produits dont le prix de vente conseillé se situe entre 200 et 400 euros : une hausse de 30 euros ; 
- pour les produits dont le prix de vente conseillé est supérieur à 400 euros : une hausse de 50 euros.
 

Ces règles de prix avaient mécaniquement un impact sur les prix d'achat facturés par les fabricants à leurs clients distributeurs, dans la mesure où toute augmentation du prix de vente conseillé entraînait une augmentation du tarif de base, à partir duquel était calculé le prix d'achat par le distributeur en fonction de coefficients prédéterminés par chaque fabricant et par type d'appareil.
 

Les échanges, organisés au plus haut niveau des entreprises, avaient lieu lors de réunions secrètes en marge des réunions du « GIFAM » et dans des restaurants


Les rencontres se tenaient en marge des réunions officielles du syndicat du secteur, le GIFAM, ou lors de réunions secrètes dans des restaurants parisiens proches du siège du syndicat (tels que le salon de thé Ladurée ou le Corona Impérial).

La concertation sur les hausses de prix se déroulait en trois étapes. Dans un premier temps, les dirigeants des entreprises se réunissaient pour définir les grandes lignes des hausses des prix avant que les responsables marketing ne discutent, ensuite, de leur mise en œuvre. Enfin, les dirigeants se réunissaient à nouveau pour finaliser les modalités de la hausse de prix discutée et garantir ainsi un meilleur suivi. Des échanges téléphoniques complétaient ces discussions.
Outre cette entente, les fabricants, à l'exception d'Electrolux, se sont également concertés entre mai et septembre 2009 sur les conditions commerciales appliquées aux cuisinistes dans le but de réduire le coût des contrats d'exposition de leurs produits chez les cuisinistes. 


Une entente de grande ampleur qui a impacté les prix payés par les distributeurs et in fine par les consommateurs


Dans la mesure où les prix de gros étaient directement impactés par l'évolution des prix recommandés, la fixation en commun par les fabricants des hausses de prix de vente conseillés a renchéri les prix facturés aux  distributeurs. Ces pratiques ont également été susceptibles d'affecter les prix pratiqués in fine, aux consommateurs. L'entente a concerné une très forte proportion du marché compte tenu des parts de marché des participants à l'entente (70 % en 2012) et des marques concernées parmi les plus connues.

Si le pouvoir de négociation des distributeurs ou la montée en puissance de concurrents asiatiques (Samsung, LG), ont pu atténuer les effets de l'entente, il n'en demeure pas moins que ces pratiques ont pu freiner la tendance globale à la baisse des prix prévalant dans le secteur.

Dans le cadre du calcul des sanctions infligées aux entreprises concernées, l'Autorité a tenu compte de ces éléments ainsi que des demandes de transaction déposées par l'ensemble des protagonistes à l'entente. La procédure de transaction permet en effet aux entreprises qui ne contestent pas les faits de se voir attribuer une réduction substantielle de sanction. 

BSH, qui a, par ailleurs, souhaité bénéficier de la procédure de clémence, s'est vu attribuer une réduction de sanction supplémentaire pour sa collaboration active à l'instruction, notamment en ayant apporté des éléments de preuve complémentaires, qui ont permis à l'Autorité de sanctionner des pratiques spécifiques.

L'Autorité a ainsi prononcé les sanctions suivantes :

Entreprise Sanction prononcée
BSH 23 000 000 €
Candy Hoover 15 000 000 €
Eberhardt Frères (Liebherr) 1 000 000 €
Electrolux 48 000 000 €
Indesit (absorbé par Whirlpool après les pratiques) 46 000 000 €
Whirlpool 56 000 000 €
Total 189 000 000 €

1Ces fabricants représentaient environ 70 % des ventes en France en 2012.
2Le groupe Indesit a été absorbé par le groupe Whirlpool postérieurement aux pratiques.
3La procédure de clémence permet aux entreprises qui participent ou ont participé à une entente d'en révéler l'existence à l'Autorité et d'obtenir, sous certaines conditions, le bénéfice d'une exonération totale ou partielle de sanction pécuniaire, en fonction notamment de leur rang d'arrivée à l'Autorité, de la valeur ajoutée des pièces apportées et de leur coopération à l'enquête.
 

Contact(s)

Virginie Guin
Virginie Guin
Directrice de la communication
Yannick Le Dorze
Yannick Le Dorze
Adjoint à la directrice de la communication
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