Télécoms

L’Autorité de la concurrence rend trois avis à l’ARCEP concernant l’analyse des marchés de gros des terminaisons d’appel pour la période 2014-2016 et appelle de ses vœux une application accélérée et généralisée du cadre réglementaire européen

marchés de gros des terminaisons d’appel

Saisie par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), l’Autorité de la concurrence rend aujourd’hui trois avis dans le cadre de la procédure d’analyse des marchés de gros des terminaisons d’appel (ci-après TA) vocal (fixe et mobile) et SMS. Ces avis s’inscrivent dans le cadre des troisième et quatrième cycles d’analyse de ces marchés et font notamment suite aux précédents avis déjà rendus dans ce cadre1.

La terminaison d’appel désigne la partie terminale du réseau de l’opérateur (fixe ou mobile) de l’appelé. Le niveau des prix de gros des terminaisons d’appel est déterminant dans l’animation concurrentielle des marchés de détail puisque, d’un point de vue économique, la facturation de la TA entre opérateurs représente un revenu pour l’opérateur de l’appelé et une charge pour l’opérateur de l’appelant.

Bilan des précédents cycles de régulation : une évolution générale vers des offres illimitées tous réseaux et un basculement vers le mode d’interconnexion IP

S’agissant tout d’abord des communications vocales fixes, l’Autorité constate le développement significatif de la téléphonie en voix sur large bande (ou voix sur IP) qui concentre aujourd’hui plus des deux tiers des appels, au détriment de la téléphonie classique sur le réseau téléphonique commuté (RTC), en fort recul. Cette évolution confirme une tendance de fond observée lors des précédents cycles de régulation, à savoir le basculement général vers le mode d’interconnexion IP et la fin programmée du réseau téléphonique commuté.

S’agissant ensuite des communications vocales mobiles, l’Autorité relève qu’entre 2010 et 2013, les offres illimitées tous réseaux 24h / 24 se sont progressivement généralisées au point de devenir un des standards du marché en métropole et, plus tardivement, dans les DOM. L’arrivée de nouveaux acteurs, notamment Free Mobile, a constitué une véritable rupture du point de vue tarifaire et du point de vue de la simplification des offres.

Enfin, concernant les SMS, les marchés de détail ont été caractérisés, entre 2010 et 2013, par un développement massif des offres incluant des SMS illimités sans contrainte de réseau pour un prix forfaitaire, qui ont favorisé l’explosion des usages du SMS. De telles offres se sont généralisées en métropole, et dans une partie des DOM.

L’ensemble des évolutions ainsi constatées sur les marchés de détail ont été permises par les baisses de prix des TA sur les marchés de gros intervenues au cours du précédent cycle de régulation.

TA SMS et MMS : l’Autorité de la concurrence se prononce en faveur du maintien d’une régulation ex ante sur la période 2014-2016 pour les SMS, mais considère qu’une telle régulation ne se justifie pas pour les MMS

A l’horizon 2016, aucun autre service de messagerie (MMS, e-mail mobile, autres messageries instantanées) ne semble encore pouvoir se substituer au SMS, du fait du caractère universel de ce service accessible à 100 % des terminaux mobiles actuellement en circulation. Compte tenu de l’apparition de nouveaux opérateurs sur ce marché, il semble utile de permettre à l’ARCEP d’aligner les conditions de concurrence entre opérateurs, afin que le marché se stabilise, avant d’envisager la levée progressive des obligations imposées, le cas échéant avant la fin du présent cycle d’analyse si les évolutions économiques le justifient.

S’agissant des MMS, s’il est confirmé que des problèmes sont susceptibles d’affecter le fonctionnement de ce service d’envoi de messages multimédia2, l’Autorité n’est pas en mesure de confirmer que l’imposition d’obligations ex ante se justifie à ce stade. D’une part, contrairement au SMS, le service MMS n’existe que sur les terminaux multimédia, et sur ces terminaux d’autres services de messagerie lui sont substituables. D’autre part, il n’est pas démontré que les outils de régulation symétrique dont dispose l’ARCEP, notamment ses pouvoirs de sanction et de règlement des différends, ne suffiraient pas à résoudre les problèmes identifiés. C’est pourquoi l’Autorité considère que la mise en place de remèdes ex ante ne se justifie pas au regard des conditions posées par la Commission européenne et ne constitue pas nécessairement la réponse la plus efficace et la mieux adaptée pour résoudre les problèmes identifiés.

TA vocal fixe et mobile : pour ne pas pénaliser les opérateurs français, l’Autorité de la concurrence appelle de ses vœux une application accélérée et généralisée du cadre réglementaire européen pour les appels internationaux

L’Autorité émet un avis favorable en ce qui concerne la mise en œuvre d’un nouveau cycle de régulation de la terminaison d’appel vocal (fixe et mobile) pour la période 2014-2016, particulièrement en ce qui concerne la nécessité d’accompagner la migration des réseaux fixes vers le tout IP.

Plus largement, sur le niveau des TA vocal fixe et mobile, l’Autorité souligne que la France est le pays de l’Union Européenne où les tarifs de TA sont les plus bas. En effet, le régulateur français a été l’un des plus rapides dans l’application de la recommandation de la Commission européenne du 7 mai 2009 visant à aligner les tarifs de terminaison d’appels fixe et mobile dans l’UE sur le niveau des coûts effectifs constatés.

Cependant, l’application non homogène de la recommandation européenne et le défaut d’harmonisation entre les pays de l’UE sont nettement préjudiciables aux opérateurs français. En effet, ces opérateurs qui, conformément à l’application de la recommandation précitée, ont vu leur revenu de terminaisons d’appel baisser de manière significative entre le 1er janvier 2011 et le 1er janvier 2013, se trouvent aujourd’hui pénalisés vis-à-vis de certains opérateurs étrangers, compte tenu du choix de l’autorité de régulation nationale de ces derniers de ne pas appliquer ou d’appliquer avec retard le cadre réglementaire communautaire. Cette difficulté est renforcée à l’échelle internationale, hors UE, en raison de déséquilibres de trafic et d’écarts de prix qui peuvent être encore supérieurs, notamment dans certaines zones géographiques.

Ces différences d’approche réglementaire entre pays, qui induisent des transferts financiers non négligeables au détriment des opérateurs français, ne sont aujourd’hui pas justifiées par des raisons techniques ni économiques objectives. C’est pourquoi l’Autorité de la concurrence appelle de ses vœux d’une part une application accélérée et généralisée du cadre réglementaire de l’UE et des recommandations de la Commission européenne, et d’autre part la mise au point d’un cadre permettant aux opérateurs européens de bénéficier de conditions de concurrence équilibrées avec leurs homologues non-européens.

(1) Avis n° 11-A-07 (TA fixe), n° 10-A-17 et 11-A-19 (TA mobile) et n° 10-A-12 (TA SMS).
(2) En premier lieu, et comme le soulignent les opérateurs mobiles entrés récemment sur le marché, les niveaux élevés de tarifs de terminaison d’appel MMS semblent très supérieurs aux coûts observés. En second lieu, les usages liés aux MMS restent relativement peu développés, notamment en outre-mer, et leur prix à l’unité demeure élevé. Enfin, il semble que le MMS fasse l’objet de problèmes d’interopérabilité et d’accès, notamment dans les départements d’outre-mer.

 

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Yannick Le Dorze
Yannick Le Dorze
Adjoint à la directrice de la communication
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