Distribution de la presse
L’Autorité de la concurrence n’est pas compétente pour connaître des décisions prises
par le Conseil supérieur des messageries de presse (CSMP).
L’Autorité de la concurrence rend aujourd’hui une décision par laquelle elle déclare irrecevable, car ne relevant pas de sa compétence, la majeure partie de la saisine (assortie d’une demande de mesures conservatoires) déposée devant elle par les Messageries Lyonnaises de Presse (MLP). La saisine concernait deux décisions prises par le CSMP relatives, d’une part, aux modalités encadrant les délais de transfert de titres entre messageries (décision « préavis ») et, d’autre part, à la mise en place du système de péréquation tarifaire entre messageries (décision « péréquation »).
La loi du 20 juillet 2011 a mis en place une nouvelle régulation du secteur de la presse
La loi du 20 juillet 20111, qui modifie la loi Bichet de 1947 sur la distribution de la presse, a renforcé les pouvoirs du CSMP en lui permettant, notamment, de prendre toute mesure nécessaire pour garantir une distribution optimale de la presse et en lui confiant un rôle de conciliation dans le règlement des différends entre les messageries, les dépositaires (grossistes) et les diffuseurs (détaillants). La loi a par ailleurs créé l’Autorité de régulation de la presse (ARDP) qui est chargée de rendre exécutoires les décisions à caractère génaral prises par le CSMP.
Les pratiques visées par la saisine
Dans le cadre de ses missions, le CSMP a pris deux décisions contestées par les MLP devant l’Autorité de la concurrence. La première2 encadre les délais de transfert de titres entre messageries. Concrètement, la décision visée allonge les délais de préavis qu’un éditeur doit respecter lorsqu’il retire la distribution d’un de ses titres à une messagerie. La seconde3 instaure une péréquation tarifaire4 entre messageries destinée à faire supporter aux éditeurs de la presse magazine (MLP) certaines charges liées à la distribution des quotidiens et supportées par Presstalis, unique distributeur de la presse quotidienne nationale.
Les MLP avancent que Presstalis aurait usé de sa position au sein des organes de décision du CSMP afin que le régulateur prenne des décisions qui lui soient favorables.
Le CSMP n’étant pas un opérateur économique, l’Autorité de la concurrence ne peut connaître de ses décisions
La démarche des MLP, qui vise le processus décisionnel du CSMP, revient à mettre en cause les décisions du CSMP elles-mêmes. Or dans la mesure où le CSMP exerce exclusivement, conformément à la loi, une activité normative de régulation et d’organisation du secteur de la distribution de la presse, il ne peut pas être considéré comme intervenant sur un quelconque marché, que ce soit comme offreur ou comme demandeur de biens ou services. Dans la mesure où il n’est pas un opérateur économique, l’Autorité de la concurrence ne peut, par conséquent, pas connaître de ses décisions. En effet, le droit français et européen de la concurrence ne s’applique qu’aux seuls acteurs économiques intervenant sur un marché.
L’Autorité a donc déclaré irrecevable la majeure partie de la saisine. Seule la cour d’appel de Paris, désignée par le législateur pour connaître des décisions du CSMP, et d’ailleurs saisie par les MLP de deux recours contre les décisions en cause, est compétente pour connaître de ces recours.
Par ailleurs, l’Autorité a rejeté, faute d’éléments probants, l’autre partie de la saisine relative à des allégations d’entente, de dénigrement, de discrimination tarifaire et d’abus du droit d’agir en justice à l’encontre de Presstalis (pour plus de détails sur ces points, consulter les pages 28 à 35 de la décision).
1La loi a suivi pour partie les propositions pour une réforme du Conseil supérieur des messageries de presse (CSMP), dites « Rapport Lasserre », demandé au président de l’Autorité de la concurrence par le président de la République dans le cadre des États généraux de la presse.
2Décision n° 2012-01 du 21 février 2012. Cette décision a fait l’objet d’un recours par les MLP devant la cour d’appel de Paris.
3Décision n° 2012-07 du 3 octobre 2012. Cette décision a fait l’objet d’un recours par les MLP devant la cour d’appel de Paris.
4Dans un avis 12-A-25, l’Autorité a été invitée à se prononcer sur l’inclusion des surcoûts historiques dans le système de péréquation (voir communiqué de presse).