Transports

Transport de passagers vers l'île Saint Honorat : le Conseil estime que les moines cisterciens de l'île n'ont pas méconnu le droit de la concurrence

Saint Honorat

Le Conseil de la concurrence estime que les moines cisterciens de l'île Saint Honorat n'ont pas méconnu le droit de la concurrence en réservant la desserte maritime de l'île à une entreprise qu'ils contrôlent.

Par une décision en date du 8 novembre 2005, le Conseil de la concurrence vient de rejeter, pour absence d' éléments suffisamment probants, la saisine de la société Trans Côte d'Azur, présentée en juillet 2005, ainsi que la demande de mesures conservatoires qui l'accompagnait.

Contexte

Les îles de Lérins sont situées au sud-est de la croisette, à 800 mètres au large de Cannes. Elles sont composées de quatre îles : deux grandes, l'île Sainte Marguerite et l'île Saint Honorat, et deux îlots : l'îlot de la Tradelière et l'îlot Saint-Féréol.

La particularité de l'île Saint Honorat réside dans le fait qu'il s'agit d'une île privée, détenue en totalité - hormis ce qui relève du domaine public maritime – par la Congrégation cistercienne de l'Immaculée Conception. Cette communauté monastique comprend une trentaine de moines cisterciens et exerce une activité économique d'hôtellerie ainsi que de production et vente de différents biens de consommations. Elle accueille pendant la journée des visiteurs attirés par le charme et le calme de l'île et de l'église abbatiale.

La Congrégation est également concessionnaire de l'unique ponton existant pour accoster sur l'île et réserve l'utilisation exclusive de celui-ci à sa société filiale de transport Planaria, laquelle se trouve ainsi de ce fait en situation de monopole pour la desserte de l'Île.

La plainte de Trans Côte d'Azur

Trans Côte d'Azur est une société filiale de la Société Nouvelle de Remorquage et de Transport Maritime (SNRTM) basée à Toulon. Créée au début des années 1990 pour développer l'activité dans les Alpes Maritimes, Trans Côte d'Azur a jusqu'en 1996 été basée à Nice, où elle a développé une activité essentiellement touristique de promenade en mer avec navette régulière vers les îles de Lérins, étendue ensuite jusqu'à Saint Tropez, la baie de Villefranche et Monaco.

Installée à Cannes en 1996, Trans Côte d'Azur proposait jusqu'en mai 1999 à partir du vieux port de Cannes, plusieurs ligne de transport de passagers, dont des liaisons régulières toute l'année vers l'île Saint Honorat.

Trans Cote d'Azur soutient que la Congrégation abuse de sa position dominante, en réservant au bénéfice de la compagnie maritime Planaria, en dehors de toute procédure de mise en concurrence, la desserte de l'île et en refusant l'accès à l'unique ouvrage d'accostage de l'île, au préjudice de la saisissante et de l'ensemble des autres compagnies desservant l'île avant 1999.

Trans Côte d'Azur souligne que ces pratiques ont eu un effet restrictif sur la concurrence, car aucune compagnie maritime autre que Planaria ne propose plus de desservir l'île Saint Honorat ni de simplement y faire escale dans le cadre d'une offre d'excursion touristique couplant cette île avec l'île de Sainte Marguerite, alors qu'elles continuent toutes aujourd'hui à desservir l'île Sainte Marguerite.

Le Conseil de la concurrence a considéré que la desserte monopolistique de l'île répondait à une nécessité objective

Le Conseil de la concurrence a considéré qu'en se réservant le monopole du transport des passagers vers l'île, la Congrégation avait étendu le monopole qu'elle exerce, s'agissant des passagers souhaitant visiter le domaine privé de l'île, à ceux des passagers qui ne seraient candidats qu'à la visite du domaine public.

Cependant, après examen des justifications avancées par la Congrégation, il a considéré que la création de la compagnie de transport Planaria et la desserte monopolistique de l'île répondaient à une nécessité objective, justifiée par la géographie particulière des lieux, le caractère privé de l'île et la nécessité d'assurer la maîtrise du flux des visiteurs.

En effet, l'objectif de limitation du nombre de visiteurs poursuivi par la Congrégation est justifié par la nécessité de préserver, sur un site peu étendu, la tranquillité du lieu monastique et de sauvegarder l'intégrité du site classé. L'ouverture passée de la desserte de l'île à plusieurs compagnies concurrentes s'est soldée par un afflux trop grand de visiteurs, surtout pendant l'été (de 2 à 3000 visiteurs par jour), incompatible avec ces objectifs.

Dans l'hypothèse où d'autres compagnie privées seraient autorisées à accoster sur l'unique débarcadère de l'île, le seul moyen pour réguler le flux de visiteurs serait d'appliquer une politique de quotas pour chaque compagnie. Ce dispositif serait à la fois malaisé à mettre en œuvre, puisqu'il faudrait réserver à chaque compagnie, outre un quota de passagers, des créneaux horaires pour accoster, compte tenu de l'exiguïté du débarcadère n° 14 (135 m2) et difficile à faire respecter, compte tenu de la géographie des lieux.

Le Conseil de la concurrence a donc estimé qu'aucune solution ne permettait d'atteindre les mêmes objectifs tout en présentant de moindres restrictions de concurrence et que par conséquent la saisine devait être rejetée.

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Yannick Le Dorze
Yannick Le Dorze
Adjoint à la directrice de la communication
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