Energie / Environnement

Le Conseil de la concurrence souhaite plus de concurrence sur le marché de la fourniture d'eau en Ile-de-France

Eau

A l'occasion de la publication de la décision 05-D-58, relative à des pratiques relevées dans le secteur de l'eau potable en Ile-de-France, le Conseil de la concurrence souhaite attirer l'attention des collectivités de la région Ile-de-France sur l'importance d'introduire une réelle concurrence sur le marché amont de la fourniture d'eau.

La particularité du marché de la fourniture d'eau en Ile-de-France

Le marché de la production d'eau est dominé par trois opérateurs : le Syndicat des eaux d'Ile-de-France (Sedif) avec 37 % du marché, la Société anonyme de gestion des eaux de Paris (Sagep) avec 33 %, et le groupe Lyonnaise des Eaux avec 19 %. A eux trois, ils couvrent 90 % des besoins franciliens.

La production d'eau est largement excédentaire en Ile-de-France, puisqu'elle représente le double de la consommation, ce qui va bien au-delà de la marge nécessaire au titre de la sécurité générale de l'approvisionnement et pour couvrir les pics de consommation en été.

En outre, les réseaux des producteurs d'eau sont interconnectés au niveau des canalisations principales ou secondaires de transport notamment pour les besoins de l'alimentation de secours.

Les fournisseurs d'eau ne proposent pas de tarif de vente d'eau en gros à destination d'une demande située en dehors de leur zone de distribution respective, ce qui empêche la formation d'un prix de gros par des mécanismes de marché.

Le marché reste cloisonné entre les différentes zones contrôlées par chacun des producteurs

Les communes ou syndicats de communes sont, soit de petite taille et ne possèdent que la partie terminale des réseaux de distribution les concernant, soit des entreprises intégrées de grande taille confiant la gestion de la totalité de la chaîne de production et distribution qu'elles possèdent à l'un des deux grands opérateurs : la CGE pour le Sedif et la Sagep (rive droite de Paris), la Lyonnaise des Eaux pour la Sagep (rive gauche).

Bien que toutes les conditions techniques -en termes de ressource et d'interconnexion- soient réunies pour la mise en place d'un marché de gros de la fourniture d'eau, on constate aujourd'hui que le marché reste cloisonné entre les différentes zones contrôlées par chacun des producteurs.

Faute de marché de gros, il n'existe aucune concurrence possible entre les producteurs d'eau lors de la mise en concurrence des délégations de distribution de l'eau, et il n'arrive que très rarement que la délégation soit obtenue par une entreprise autre que celle qui produit l'eau.

Les communes ont un rôle particulier à jouer pour introduire davantage de concurrence sur le marché de la fourniture et du transport de l'eau

Le Conseil insiste sur la possibilité pour les communes de la région Ile-de-France de dissocier désormais le marché de la fourniture d'eau de celui de sa distribution lors de la remise en concurrence des délégations de service public de distribution d'eau.

Ce dégroupage permettrait aux communes de pouvoir appeler prioritairement les ressources disponibles en eau les moins chères au bénéfice de leurs usagers et de pouvoir parallèlement bénéficier des meilleures prestations en matière de distribution.

Les communes sont, en effet, en droit :

  • de cesser de s'adresser exclusivement à l'offreur d'eau en gros qui détient le monopole du réseau de moyen débit qui dessert leur territoire ;
  • et de dégrouper leur délégations de service public, lorsqu'elles sont remises en concurrence, en séparant ce qui concerne le service de la fourniture d'eau en gros du service de sa distribution dans la commune.

La décision 05-D-58 que le Conseil de la concurrence vient de rendre, sanctionne le comportement de la Lyonnaise des Eaux et celui du Syndicat des eaux d'Ile-de-France (Sedif).

Le comportement de la Lyonnaise des Eaux illustre, de façon concrète et éclairante, par quels moyens un opérateur en monopole de fait sur la fourniture de l'eau, a obtenu d'être choisi par un syndicat comme délégataire du service de distribution de l'eau.

La Lyonnaise des Eaux a offert au Syndicat du nord-est de l'Essonne (NEE), un prix de vente en gros de l'eau -en cas de fourniture seule- supérieur de 17 % au prix consenti dans sa proposition globale « fourniture + distribution ». Cette pratique de couplage visait manifestement à handicaper toute offre concurrente sur la partie distribution, puisqu'elle permettait à La Lyonnaise de se réserver de manière discriminatoire un prix inférieur à celui de son offre dissociée de vente en gros.

Le comportement du Syndicat des eaux d'Ile-de-France montre, par ailleurs, comment un opérateur en monopole de fait sur la fourniture de l'eau, est intervenu pour empêcher toute ouverture, même très ponctuelle, du marché de l'eau en gros. Ce syndicat est intervenu afin de peser sur la finalisation d'un contrat de fourniture d'eau entre l'un de ses principaux clients, la Semmaris (société gérant le Marché d'intérêt national de Rungis) et son concurrent, la Société anonyme de gestion des eaux de Paris (Sagep), qui disposait d'eau en gros livrable au MIN de Rungis à un prix plus faible de 22,5 %.

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Yannick Le Dorze
Yannick Le Dorze
Adjoint à la directrice de la communication
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