L’Autorité de la concurrence obtient de Météo-France des engagements concernant la séparation entre ses activités commerciales et ses missions de service public.

Météo-France s’engage notamment à faire évoluer puis auditer sa comptabilité analytique.

 

Saisie par la société Météo Consult de pratiques mises en œuvre par Météo-France, qui selon la requérante seraient constitutives de prix prédateurs, l’Autorité de la concurrence rend aujourd’hui une décision par laquelle elle accepte et rend obligatoires les engagements pris par Météo-France concernant notamment la séparation comptable entre ses activités commerciales et ses missions de service public ainsi que l’audit et la certification d’une comptabilité analytique.

La plainte de Météo Consult

Météo-France est un établissement public à caractère administratif, en charge de missions de service public (sécurité météorologique des personnes et des biens, observations météorologiques, prévisions, conservation de la mémoire du climat, etc), et qui s’est diversifié, depuis les années 1980, en développant par ailleurs des activités commerciales, représentant aujourd’hui un chiffre d’affaires d’environ 40 millions d’euros.

Météo Consult1, la société requérante, propose des services de météorologie au grand public (par voie téléphonique et sur internet) ainsi qu’aux professionnels. Sa plainte concerne ce deuxième marché. Elle estime avoir été évincée d’une série d’appels d’offres du fait des prix artificiellement bas proposés par Météo-France aux entreprises. Elle reproche à Météo-France d’avoir utilisé les redevances et subventions allouées à sa mission de service public pour financer ses activités en concurrence (« subventions croisées »), afin de l’évincer du marché.

Les préoccupations de concurrence : un risque de prix prédateurs

Dans son évaluation préliminaire de concurrence, en septembre 2011, l’Autorité avait considéré que, malgré la marge commerciale positive de Météo-France, un risque de subventions croisées entre ses activités de service public (en monopole) et ses activités commerciales (en concurrence) ne pouvait être écarté, compte tenu de l’absence d’un système fin de comptabilisation analytique des coûts et des revenus. Ces subventions croisées pourraient permettre une pratique de prix prédateurs, qui consiste à commercialiser des services à un prix de vente ne couvrant pas l’intégralité des coûts, en vue d’évincer les concurrents du marché.

Les engagements proposés par Météo-France, rendus obligatoires par l’Autorité, visent à garantir une concurrence saine et loyale sur le marché de la fourniture de services météorologiques

Afin de répondre aux préoccupations de concurrence soulevées par l’Autorité, Météo-France lui a soumis, le 28 septembre 2011, des propositions d’engagements2, puis de nouvelles versions de ces engagements, à la suite du « test de marché » et de la discussion devant le Collège de l’Autorité.

Dans la décision rendue aujourd’hui, l’Autorité rend obligatoires les engagements suivants pris par Météo-France, qui répondent aux préoccupations de concurrence, et devront être mis en œuvre de façon rapide de manière à garantir promptement l’exercice d’une concurrence effective et loyale entre les différents acteurs de la fourniture de services météorologiques aux entreprises (voir le détail des engagements pp. 24 à 26 de la décision).

  • Séparation comptable : Météo-France s’engage à faire évoluer sa comptabilité analytique en vue de séparer clairement les missions de service public des activités commerciales, en identifiant précisément les coûts et les revenus (dont les subventions au service public) affectés à chacune de ces deux branches. Cet engagement restera en vigueur pour une durée indéterminée.
     
  • Désignation d’un auditeur indépendant, qui sera chargé de l’audit des clés d’allocation et de la comptabilité analytique, pour une durée de 5 ans.
     
  • Transmission annuelle des coûts de Météo-France à l’Autorité: Météo-France communiquera annuellement un état synthétique de ses coûts et revenus, et ce jusqu’à l’exercice clos fin 2015.
     
  • Mise en place d’un processus de contrôle interne des modalités d’élaboration des offres de prestations « à façon »3 à destination des professionnels.

Ces engagements sont en ligne avec les recommandations de la Cour des comptes, qui avait déjà préconisé en 2005 la mise en place d’outils de comptabilité analytique (séparation des comptes de selon les branches d’activités), répondant par la-même aux recommandations de l’Autorité de la concurrence en matière de diversification des monopoles publics. La diversification des activités des opérateurs historiques n’est pas interdite en elle-même et peut avoir un impact bénéfique sur les consommateurs. Toutefois, l’Autorité a préconisé à maintes reprises4 la nécessité d’une séparation claire entre les activités en monopole et celles ouvertes à la concurrence, comme condition minimale afin d’assurer un bon fonctionnement de la concurrence.


(1) Météo Consult réalise un chiffre d’affaires d’environ 7 millions d’euros et compte une quarantaine de salariés. Elle appartient depuis 2008 au Groupe Figaro.
(2) Ces propositions d’engagements ont été publiées le 28 septembre 2011 sur le site internet de l’Autorité, dans le cadre d’un test de marché ouvert à tous les tiers potentiellement intéressés.
(3) Les prestations « à façon », c’est-à-dire élaborées sur-mesure pour un client donné, se distinguent des prestations « standard ».
(4) Voir notamment les avis n° 94-A-15, concernant les problèmes soulevés par la diversification des activités d’EDF et de GDF au regard de la concurrence, et n° 95-A-18, concernant les problèmes soulevés par les activités de messagerie de la SNCF au regard de la concurrence.
 
 
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