Questions-réponses sur le programme de clémence français
Les questions-réponses figurant dans ce document sont destinées à faciliter la lecture du communiqué de procédure de l'Autorité de la concurrence, du 2 mars 2009, relatif au programme de clémence français. Leur contenu ne saurait engager l'Autorité de la concurrence.
Le décret du 10 mai 2021 ainsi que l’ordonnance du 21 mai 2021 transposent les dispositions de la Directive 2019/1 du 11 décembre 2018 visant à doter les autorités de concurrence des États membres des moyens de mettre en œuvre plus efficacement les règles de concurrence et à garantir le bon fonctionnement du marché intérieur, dite ECN+, en droit français. Cette Directive vise notamment à harmoniser les programmes de clémence dans l’UE et à imposer un dénominateur minimum commun à tous les Etats membres en la matière.
Le Code de commerce, qui constitue la base juridique du programme de clémence français, prévoit que la procédure de clémence peut être appliquée en relation avec un cartel, restriction par objet, prohibé par le droit interne et le droit de l’UE.
Les cartels (ententes horizontales entre concurrents) sont particulièrement préjudiciables à l'ordre public économique et aux consommateurs. Ils sont en effet souvent parmi les plus difficiles à détecter. La possibilité est donc offerte aux entreprises, qui participent à des cartels, d'en dénoncer l'existence et de coopérer à la procédure ouverte à leur sujet, en échange d'un traitement favorable.
L’Autorité accepte également des demandes de clémence portant sur des pratiques mises en place par l’intermédiaire d’acteurs en relation verticale avec les auteurs de la pratique (« hub and spoke »).
Depuis l'entrée en vigueur de la loi sur les nouvelles régulations économiques (« NRE ») le 15 mai 2001, la clémence a connu un réel succès. Plus de 160 demandes de clémence ont au total été présentées par des entreprises françaises ou étrangères.
Il existe deux hypothèses dans lesquelles une entreprise peut obtenir le bénéfice d'une exonération totale de sanctions pécuniaires.
La première d'entre elles (dite « cas de type 1 A ») est celle dans laquelle la demande permet à l'Autorité de la concurrence de procéder ou de faire procéder à des opérations de visite et saisies à propos d'un cartel. En pareil cas, une entreprise peut bénéficier d'une exonération totale de sanctions pécuniaires si :
- elle est la première à leur fournir des informations et des éléments de preuve de l'existence de cette entente, et
- l'Autorité de la concurrence ne disposait pas antérieurement d'informations et d'éléments de preuve suffisants pour procéder ou faire procéder de sa propre initiative à des opérations de visite et saisies ou n’avait pas encore procédé à ces opérations.
La seconde hypothèse (dite « cas de type 1 B ») est celle dans laquelle la demande permet de constater l'existence d'une entente. En pareil cas, une entreprise peut bénéficier d'une exonération totale de sanctions pécuniaires si :
- elle est la première à fournir des informations et des éléments de preuve suffisants pour permettre de constater l'existence d'une infraction,
- l'Autorité de la concurrence ne disposait pas antérieurement d'informations et d'éléments de preuve suffisants à cet effet, et
- aucune entreprise n'a obtenu le bénéfice d'une exonération totale de sanctions pécuniaires au titre du cas de type 1 A.
- Afin de garantir au mieux la prévisibilité et la transparence, l'Autorité de la concurrence a énuméré, dans son communiqué de procédure, la liste des informations et des éléments de preuve à fournir par l'entreprise ou l'organisme qui demande le bénéfice de la clémence.
- Cette liste est différente selon que l'Autorité de la concurrence dispose déjà ou non d'informations sur l'entente présumée.
- Toute entreprise souhaitant bénéficier de la clémence doit présenter sa demande à l'Autorité de la concurrence en fournissant une première série d'informations. L'objectif n'est pas d'avoir à ce stade une demande de clémence complète. L'entreprise dispose par la suite d'un délai précis (« le délai de marqueur ») qui lui permet de rassembler l'ensemble des autres éléments permettant d'atteindre le standard requis pour bénéficier de la clémence. Si l'entreprise complète sa demande de clémence dans le délai imparti, tous les éléments fournis seront considérés comme ayant été communiqués à la date d'octroi du marqueur.
Une possibilité d'introduire une demande sommaire a été mise en place dans les cas où la Commission européenne est particulièrement bien placée pour agir. Afin d'alléger la charge que de multiples demandes parallèles représenteraient alors pour les entreprises et les autorités de concurrence, il est désormais possible d'introduire une demande sommaire auprès de l'Autorité de la concurrence après avoir déposé une demande principale à la Commission européenne.
Si l'une des conditions exigées par l'Autorité de la concurrence pour obtenir l'exonération totale de sanctions pécuniaires fait défaut, le demandeur ne perd pas nécessairement le bénéfice de toute clémence, mais peut encore prétendre à une exonération partielle.
- Toute entreprise qui fournit des éléments de preuve apportant une valeur ajoutée significative aux éléments de preuve déjà en la possession de l'Autorité de la concurrence peut bénéficier d'une exonération partielle.
- La notion de valeur ajoutée vise la mesure dans laquelle les éléments de preuve fournis renforcent, par leur nature même, par leur niveau de précision et/ou par leur complémentarité avec d'autres pièces déjà en sa possession, la capacité de l'Autorité de la concurrence à établir les faits en question.
- L'exonération partielle des sanctions pécuniaires alors accordée ne saurait en principe excéder 50 % du montant de la sanction qui aurait été imposée en l'absence de clémence.
Le marqueur est le constat de la date et de l’heure d’arrivée de l'entreprise ou l'organisme qui demande à obtenir le bénéfice de la clémence, afin de lui garantir un ordre d'arrivée tout en lui permettant de disposer d'un délai précis pour compléter sa demande.
Pour obtenir un délai de marqueur, l'entreprise ou l'organisme demandeur doit fournir, en plus de ses coordonnées, des informations sur :
- le(s) produit(s) et le(s) territoire(s) concernés,
- l'identité des participants à l'entente présumée,
- la nature, la champ et la durée estimée de cette entente présumée, et le cas échéant
- toute demande de clémence à ce propos.
Un formulaire est mis à disposition afin d’aider le demandeur à fournir les éléments requis.
Non, car l'entreprise ne sait pas dans quel contexte est présentée sa demande. Ainsi, une seule demande doit être adressée à l'Autorité de la concurrence, indépendamment du type de clémence qui pourra être applicable au demandeur.
Le conseiller clémence pour instruire la demande de clémence confirme dès que possible à l'entreprise demanderesse si cette demande relève du type 1 A ou d'un autre cas.
Sur la base des informations et des éléments de preuve remis par le demandeur, les services d’instruction analyseront la demande de clémence. Si le standard requis est atteint, le rapporteur général enverra une lettre d’éligibilité rappelant les obligations de coopération au demandeur de clémence.
Une fois sa demande de clémence effectuée, l'entreprise ou l'organisme qui en est l'auteur doit en particulier respecter l'obligation de coopération qui lui incombe pendant toute la durée de la procédure.
Cette obligation constitue une condition de fond dont dépend le bénéfice de la clémence.
Elle consiste, pour le demandeur, à apporter à l'Autorité de la concurrence une coopération véritable, totale, permanente et rapide tout au long de la procédure d'enquête et d'instruction. Elle comporte plusieurs aspects visant à garantir l'effectivité de la procédure. Ceux-ci comprennent, par exemple, l'obligation de fournir des informations aux autorités de concurrence ou de se tenir à leur disposition, l'obligation de mettre les représentants légaux et les salariés à leur disposition, ou encore l'obligation de ne pas détruire, falsifier ou dissimuler des informations.
D’autres conditions de fond dont dépend le bénéfice de la clémence consistent notamment, pour l'entreprise ou l'organisme en cause, à mettre fin sans délai à sa participation à l'entente présumée, sauf s’il existe un risque que cela éveille les soupçons des autres participants, et à ne pas avoir détruit ou falsifié de preuves de l'entente présumée avant de présenter sa demande de clémence.
L'entreprise peut, si elle le souhaite, demander que sa demande de clémence soit traitée sur une base entièrement orale. Sa déclaration est alors enregistrée sur support électronique. Pour les besoins de l'instruction et de la séance devant l'Autorité de la concurrence, un procès-verbal de la transcription de la déclaration est dressé par le conseiller clémence. Les déclarations du demandeur de clémence font partie des documents protégés au sens de l’Ordonnance n° 2017-303 du 9 mars 2017 relative aux actions en dommages et intérêts du fait des pratiques anticoncurrentielles.
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