Le développement du commerce en ligne modifie en profondeur le paysage de la distribution. Le modèle de la distribution physique est fortement concurrencé par le développement de la vente en ligne, qui peut être le fait d’acteurs spécialisés (ou « pure players ») ou de stratégies s’appuyant sur les différents canaux de distribution. Les modalités de vente en magasin physique évoluent également, en intégrant de plus en plus des technologies numériques (recours aux smartphones, tablettes, technologies augmentées etc.), au point que l’on évoque un modèle « Phygital » (pour physique et digital). Enfin, ces évolutions soulèvent de multiples questions pour l’Autorité de concurrence, en la conduisant parfois à redéfinir les délimitations de marché, à s’intéresser aux restrictions de ventes sur internet, ou encore à approfondir le nouveau pouvoir détenu par les plateformes en ligne, notamment les plateformes structurantes qui occupent des positions stratégiques ou incontournables.

Compte tenu de la place éminente qu’occupe le secteur de la distribution dans l’économie française, l’Autorité a souhaité faire un panorama d’ensemble de ces différentes questions et expliciter sa vision, afin d’éclairer les entreprises.

L’Autorité a créé en 2018 avec La Documentation française la collection « Les Essentiels », qui a pour but de développer la pédagogie de la concurrence. Après un premier ouvrage consacré  aux remises fidélisantes et un deuxième portant sur les engagements comportementaux, elle publie en mai 2020 une nouvelle étude consacrée à la thématique « Concurrence et commerce en ligne » et faisant le point sur l’action de l’Autorité de la concurrence dans les domaines touchant à la vente en ligne.

L’étude est dès à présent disponible sur le site de l’Autorité de la concurrence.

Une étude dédiée aux incidences du e-commerce sur la politique de concurrence

Les consommateurs sont de plus en plus nombreux à se tourner vers la vente en ligne : les achats en ligne représentent aujourd’hui un peu moins de 10 % du commerce de détail1 en France, avec une croissance rapide d’environ 14 % par an entre 2014 et 20182. Du côté de l’offre, les acteurs du commerce en magasin ou en agence physique (canal « hors ligne » ou « brick&mortar ») ont répondu à l’appétence croissante des consommateurs pour les achats en ligne en développant ou en acquérant des sites Internet et/ou des applications pour commercialiser leurs produits et services en ligne, devenant ainsi des opérateurs actifs à la fois dans la vente en points de vente physiques et en ligne (vendeurs « click&mortar » ou « phygital »). Parallèlement, de nouveaux acteurs, actifs quasi-exclusivement dans la vente sur Internet (ou « pure players »), ont développé leur présence de manière significative. Enfin, la crise liée à la pandémie Covid-19 a montré le rôle clef aujourd’hui occupé par le commerce en ligne dans notre économie, et a poussé un grand nombre de consommateurs comme d’entreprises à se tourner vers la vente en ligne. Exceptionnelle, cette crise sanitaire pourrait conduire à modifier de façon durable les habitudes de certains consommateurs et ainsi contribuer à accroître la part de la vente en ligne dans le commerce de détail dans les prochaines années.

La montée en puissance du commerce électronique transforme durablement le fonctionnement du marché et les stratégies des entreprises. L’Autorité de la concurrence a souhaité faire le point sur la manière dont elle appréhende le commerce en ligne : en quoi son développement sur les marchés impacte-t-elle la dynamique concurrentielle et les comportements des consommateurs et entreprises qu’elle est amenée à étudier.

Eclairer les entreprises sur leurs pratiques en ligne et la préparation de leurs opérations de concentrations

Dans bien des cas, l’Autorité de la concurrence doit d’abord évaluer dans quelle mesure les ventes en ligne concurrencent les ventes en magasins ou en agence. Lorsque les ventes en ligne représentent une composante importante du jeu concurrentiel à l’œuvre dans un secteur, l’Autorité peut être conduite à adapter certains outils d’évaluation du pouvoir de marché, comme le calcul des parts de marché. Ainsi, depuis la décision de rachat de Darty par la FNAC, l’Autorité a été la première autorité européenne à délimiter des marchés pertinents uniques regroupant ventes en ligne et ventes physiques3.

Par ailleurs, l’étude présente également la grille d’analyse retenue par l’Autorité de la concurrence pour analyser les différents comportements d’entreprises liés à la vente en ligne qu’elle a eu à connaître (e.g., restrictions des ventes sur Internet ou clauses de parité tarifaires) et ainsi lui permettre de distinguer les restrictions licites des restrictions illicites.

En analysant de façon synthétique sa pratique décisionnelle en matière de e-commerce, l’Autorité vise à fournir des outils de compréhension aux entreprises soit dans leur préparation d’opérations de concentration, soit lorsque celles-ci s’interrogent sur la licéité de pratiques impliquant les ventes en ligne. En présentant sa grille d’analyse, l’Autorité souhaite, de façon plus générale, éclairer les entreprises concernées et l’ensemble des parties prenantes.

La prise en compte des plateformes et marché numériques dans les outils d’analyse de l’Autorité

L’étude s’insère, par ailleurs, dans la réflexion plus large menée par l’Autorité sur l’adaptation de ses moyens d’intervention aux spécificités des marches numériques4. A cet égard, l’Autorité trace ainsi des perspectives sur les modifications qui lui semblent nécessaires, dans ses outils et prérogatives, afin de prendre en compte le développement des plateformes et marchés numériques. Il lui semble tout d’abord nécessaire de développer les capacités d’analyse numérique en matière d’algorithmes et de données en masse. Afin de répondre à l’accélération des mutations et des cycles d’innovation technologiques, elle considère ensuite qu’il est justifié de recourir de façon plus large aux mesures conservatoires dans un cadre qui sera amplifié par la transposition de la directive ECN+. Enfin, pour mieux appréhender le pouvoir de marché des grandes plateformes numériques, il  paraît justifié de compléter les pouvoirs des autorités de concurrence, afin de pouvoir contrôler leurs politiques d’acquisition.

L’introduction d’obligations ou d’interdictions propres aux plateformes structurantes peut également être envisagée.

 

1FEVAD (Fédération du e-commerce et de la vente à distance), Les Chiffres Clés 2019.
2FEVAD, Les Chiffres Clés 2019, 2018, 2017 et 2016.
3Décision n° 16-DCC-111 du 27 juillet 2016 relative à la prise de contrôle exclusif de Darty par la Fnac.

4Autorité de la concurrence, Contribution de l’Autorité de la concurrence au débat sur la politique de concurrence et les enjeux numériques, février 2020.

Présentation de l'étude Concurrence & Commerce en ligne

Le chef du service économique de l'Autorité de la concurrence, Etienne Pfister, présente l'objectif de l'étude "Concurrence et Commerce en ligne" et les axes d'intervention de l'Autorité dans le secteur du phygital

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Yannick Le Dorze
Yannick Le Dorze
Adjoint à la directrice de la communication
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