Agriculture / Agro-alimentaire
L'Autorité de la concurrence autorise sous plusieurs conditions la fusion des coopératives agricoles Coopérative Dauphinoise et Terre d’Alliances
L’essentiel
Les groupes coopératifs agricoles Coopérative Dauphinoise et Terre d’Alliances ont notifié leur projet de fusion à l’Autorité de la concurrence.
L’Autorité a identifié un certain nombre de risques d’atteinte à la concurrence sur les marchés de la collecte de céréales, oléagineux et protéagineux et de la distribution au détail d’articles de jardinage, bricolage, aménagements extérieurs et animalerie.
Pour répondre à ces problèmes de concurrence, les parties ont présenté des engagements :
- en ce qui concerne la collecte, elles s’engagent à se séparer de cinq infrastructures de collecte de céréales, protéagineux et oléagineux ;
- dans le secteur de la distribution au détail en jardinerie, au regard des circonstances particulières de l’espèce, les parties s’engagent, sur le principe de la clause d’entrée en vigueur différée (ou « sunrise clause »), à soumettre à l’agrément préalable de l’Autorité de la concurrence toute décision stratégique (par exemple, certains changements d’enseigne) relative à l’un des magasins concernés par un chevauchement d’activité entre les parties, qui pourrait influencer la structure de la concurrence dans la zone de chalandise du magasin concerné.
Les parties à l’opération
Coopérative Dauphinoise et Terre d’Alliances sont deux groupes coopératifs actifs dans les secteurs de la collecte et de la commercialisation de céréales, protéagineux et oléagineux, des semences, de l’agrofourniture, de la nutrition animale et de la distribution au détail d’articles de jardinage, bricolage, aménagements extérieurs et animalerie. Ensemble, les deux coopératives regrouperont environ 9 700 associés coopérateurs principalement répartis dans l’ancienne région Rhône-Alpes.
Des problèmes de concurrence identifiés
Si l'opération ne soulève pas de problème de concurrence dans les secteurs des semences, de la nutrition animale et de l’agrofourniture, l'Autorité de la concurrence a, en revanche, considéré qu’il existait des risques d’atteinte significative à la concurrence dans les secteurs de la collecte de céréales, protéagineux et oléagineux et de la distribution au détail d’articles de jardinage, bricolage, aménagements extérieurs et animalerie.
En effet, dans le secteur de la collecte de céréales, protéagineux et oléagineux, les parts de marché de la nouvelle entité, dépasseraient 50 % dans certaines zones de collecte situées en Savoie, en Isère et dans le Rhône. L’Autorité de la concurrence, qui a disposé de données précises émanant de FranceAgriMer a pu, pour la première fois, mener son analyse locale sur des niveaux de parts de marché calculés en volumes réels collectés1. Elle a ainsi estimé que les consommateurs et les exploitants seraient privés, dans neuf zones de chalandise2, d’une alternative concurrentielle satisfaisante à l’issue de l’opération, dans la mesure où les concurrents ne seraient pas susceptibles d'exercer une pression concurrentielle suffisante sur la nouvelle entité.
Dans le secteur de la distribution en jardinerie, la très large majorité des points de vente exploités par les parties sont des magasins franchisés Gamm Vert et Gamm Vert Village, enseignes appartenant au groupe InVivo lequel pilote leur politique commerciale. Parallèlement, Coopérative Dauphinoise exploite également six points de vente sous sa propre enseigne Agri Sud Est.
Dans un tel contexte, il ne pouvait être exclu qu’à l’issue de l’opération, la nouvelle entité choisisse de transférer l’ensemble des magasins Gamm Vert et Gamm Vert Village sous enseigne Agri Sud Est. Un tel transfert aurait été de nature à modifier substantiellement la structure du marché dans les zones locales concernées.
Les engagements pris
En réponse à ces problèmes de concurrence, les parties se sont engagées à se séparer de cinq infrastructures de collecte. Elles se sont, par ailleurs, engagées à soumettre à l’agrément préalable de l’Autorité de la concurrence toute décision stratégique relative à l’un des magasins concernés par un chevauchement d’activité entre les parties.
- La cession de quatre plateformes et d’un silo de collecte
Sur le marché amont de la collecte de céréales, protéagineux et oléagineux, Coopérative Dauphinoise et Terre d’Alliances se sont engagées à céder quatre plateformes et un silo de collecte situés dans les zones où l’opération portait atteinte à la concurrence. Ainsi, à l’issue de ces cessions, les agriculteurs présents dans ces zones disposeront d’une alternative pour le stockage et la vente de leur production.
Sites concernés | Détention actuelle | Type d'infrastructure |
---|---|---|
Chamoux-sur-Gelon (73) | Coopérative Dauphinoise | Plateforme |
Jons Saint-Georges (69) | Coopérative Dauphinoise | Plateforme |
Saint-Romain-en Gal (69) | Coopérative Dauphinoise | Silo |
Veyrins (38) | Terre d’Alliances | Plateforme |
Yenne (73) | Terre d’Alliances | Plateforme |
- La clause d’entrée en vigueur différée dans le domaine de la distribution en jardinerie
Sur le marché aval de la distribution au détail d’articles de jardinage, bricolage, aménagements extérieurs et animalerie, les parties se sont engagées à soumettre à l’agrément préalable de l’Autorité de la concurrence toute décision stratégique (par exemple, certains changements d’enseigne) relative à l’un des magasins situés dans les zones de chalandises dans lesquelles l’opération donne lieu à un chevauchement d’activité entre les parties, dès lors qu’une telle décision pourrait influencer la structure de la concurrence dans la zone de chalandise desdits magasins.
Un tel engagement permet à l’Autorité de concilier sa mission de protection de l’ordre public économique avec les intérêts des parties. En effet, avant l’opération, les magasins concernés par les chevauchements d’activité sur le marché de la distribution au détail d’articles de jardinage, de bricolage, d’animalerie et d’aménagements extérieurs ne disposaient d’aucune autonomie commerciale. Dans ce contexte, un problème de concurrence sur ces zones ne pourrait émerger que si le risque, largement putatif au regard des éléments fournis par les parties, d’un changement d’enseigne des magasins actuellement exploités sous enseigne Gamm Vert et Gamm Vert Village, au bénéfice du réseau Agri Sud Est, venait à se matérialiser.
L’engagement souscrit par les parties permet donc à l’Autorité de la concurrence d’exercer son contrôle sur toute décision stratégique future susceptible d’affecter la structure de la concurrence dans la zone de chalandise du magasin concerné.
L’Autorité s’assure ainsi que les consommateurs bénéficieront le cas échéant d’un choix d’enseignes concurrentes et donc d’un maintien de la diversité en termes de prix et de services pour faire leurs achats de produits de jardin et d’animalerie.
Cet engagement inédit et justifié par les circonstances particulières de l’espèce, constitue donc un remède proportionné pour éliminer les potentielles atteintes futures à la concurrence résultant de l’opération sur le marché de la distribution au détail d’articles de jardinage, de bricolage, d’aménagements extérieurs et d’animalerie.
Cession ne signifie pas fermeture du point de collecte mais changement d’opérateur
Les cessions qui font l’objet d’engagements sont justifiées par la disparition d'une pression concurrentielle locale sur la nouvelle entité à l'issue de l'opération.
S’agissant des marchés de la collecte de céréales, protéagineux et oléagineux, l’objectif des engagements de cession est de permettre la reprise des points de collecte et de leurs activités par un opérateur concurrent de la nouvelle entité afin de maintenir l'animation concurrentielle dans la zone de collecte concernée et ainsi de garantir une offre diversifiée aux exploitants agricoles.
1Jusqu’ici, faute pour les parties de pouvoir obtenir les données relatives aux volumes réels collectés, les parts de marché, étaient exclusivement appréciées, au niveau local, en prenant en compte le nombre de points de collecte détenus par les parties et ceux de leurs concurrents. Cette nouvelle méthode permet, lorsque les données correspondantes sont disponibles, d’établir de façon plus fine les positions des parties.
2Les zones géographiques concernées sont Solaize (69), Chaponnay (69), Jons Saint-Georges (69), Sathonay (69), Veyins-Thuellin (38), Voglans (73), Francin (73) et Yenne (73).