Santé

L’Autorité de la concurrence autorise sous conditions le rachat de MédiPôle-Partenaires par Elsan

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Une opération renvoyée par la Commission européenne

Le 31 janvier 2017, la Commission européenne a renvoyé à l’Autorité de la concurrence l’examen du rachat du groupe MédiPôle-Partenaires (MPP), numéro trois des groupes privés de cliniques en France, par le groupe Elsan, numéro deux.

Cette procédure de renvoi, relativement exceptionnelle, conduit la Commission européenne, normalement compétente pour examiner une opération en raison de son envergure et de sa dimension européenne, à confier cet examen à l’autorité nationale lorsque celle-ci est mieux placée pour examiner les effets de l’opération sur les marchés nationaux.

Cette procédure de renvoi à l’Autorité française était d’autant plus opportune en l’espèce que l’opération a conduit l’Autorité, de façon novatrice, à examiner les effets des rapprochements dans le secteur des cliniques privées. Pour la première fois en France, l’Autorité de concurrence a examiné si cette opération, qui ne peut avoir d’effet sur le prix des prestations médicales soumises à une tarification obligatoire, pouvait avoir des effets tarifaires défavorables sur les prestations annexes non médicales (supplément chambre particulière, hébergement et repas des accompagnants, télévision, téléphone, prestations exceptionnelles) ou  conduire à un risque  de dégradation de la qualité de l’offre de soins médicaux offerts aux patients.

Cette appréciation des effets non-tarifaires des opérations de concentration n’est pas sans précédent. Dans d’autres secteurs (la distribution1, la presse2 et les medias3), l’Autorité avait  pris en compte, notamment, le risque de diminution de la diversité et du pluralisme.

Les parties à l’opération

En réunissant dans une même entité 109 établissements (Elsan : 68 ; MPP : 41), l’opération aboutit à la création d’un groupe de cliniques privées au même niveau que le numéro 1, Ramsay Générale de santé (RGDS).

Le groupe Elsan a notifié cette opération à l’Autorité le 7 avril 2017, à la suite d’une phase d’échanges avec les services d’instruction de l’Autorité (prénotification). La décision rendue ce jour est, au final, la première décision de l’Autorité qui identifie des risques sur la qualité de l’offre de soins ou de hausses de prix des prestations annexes aux soins (supplément chambre particulière, hébergement et repas des accompagnants, télévision, téléphone, prestations exceptionnelles), liés à la détention de plusieurs établissements de santé dans un même territoire.

Les méthodologies utilisées pour analyser les effets de l’opération dans le secteur de la santé


L’Autorité a examiné les effets de ce rachat en matière d’offre de soins et de diagnostics sur lesquels sont actifs aussi bien les hôpitaux publics que les cliniques.

Les effets de l’opération ont d’abord été examinés dans chaque grande catégorie d’activité médicale : médecine, chirurgie, obstétrique, néonatologie, psychiatrie, soins de suite et réadaptation, soins de longue durée, cancérologie, activités de diagnostic, urgences, réanimation.

Afin tenir compte de la spécialisation des praticiens et de la variété des soins hospitaliers qui ne sont pas substituables du point de vue du patient, l’Autorité a par ailleurs examiné la position des parties sur les vingt-trois catégories majeures de diagnostic (parmi lesquelles, notamment, les affections de l’œil ; des oreilles, du nez, de la gorge, de la bouche et des dents ; de l’appareil respiratoire ; de l’appareil circulatoire ; du tube digestif…).

L’Autorité a également examiné les effets de l’opération sur les activités d’hospitalisation à domicile et sur l’activité de chirurgie esthétique dite de confort.

Un risque de réduction de la diversité de l’offre de soins disponibles pour les patients et de hausse des prix des prestations non couvertes par l’assurance maladie

Une large consultation des acteurs du marché (autorités de régulation, concurrents publics et privés, organismes d’assurance maladie et mutuelles) a été réalisée dans le cadre de l’examen de cette opération.

Dans les départements du Puy-de-Dôme, du Lot-et-Garonne et du Tarn, l’opération entraîne un renforcement significatif de la position du nouveau groupe, notamment dans l’activité de chirurgie, en particulier dans de nombreuses catégories majeures de diagnostic.

L’Autorité a considéré qu’un tel renforcement de la position d’Elsan, dans les zones géographiques concernées, sur un nombre significatif de catégories de soins, était susceptible d’affecter le bien-être des patients, en réduisant leur liberté de choix et la qualité de l’offre de soins disponible.

En outre, l’instruction n’a pas permis d’écarter le risque identifié de hausse des prix des prestations annexes, qui aurait été supporté par le patient.

Les engagements proposés par Elsan

Afin de lever l’ensemble de ces préoccupations, Elsan s’est engagé à céder, à un concurrent, trois établissements de soins.

- un établissement situé dans le Puy-de-Dôme, au choix d’Elsan, parmi les trois détenus à terme par la nouvelle entité dans ce département (la clinique de La Plaine, la clinique de la Châtaigneraie, la clinique Pôle santé République) ;

- un établissement situé dans le Lot-et-Garonne : il pourra s’agir, au choix d’Elsan, soit de la participation d’Elsan dans le Pôle de Santé du Villeneuvois, soit de la clinique Esquirol-Saint-Hilaire ;

- la clinique Toulouse-Lautrec, située dans le Tarn.
 

La cession de ces trois établissements à un, ou plusieurs groupe(s) hospitalier(s) concurrent a pour effet, soit de supprimer le chevauchement d’activité résultant de l’opération dans ces trois départements, soit de réduire la position de la nouvelle entité sur les catégories majeures de diagnostic et ainsi garantir des offres de soins alternatives pour le patient.

Elsan s’est par ailleurs engagé à ce que l’opération ne soit pas susceptible d’entraver la liberté d’exercice des médecins exerçant à la fois dans ses cliniques et dans celles de groupes concurrents.

L’ensemble de ces engagements sera contrôlé par un mandataire indépendant agréé par l’Autorité.
 

Les raisons qui ont conduit l’Autorité à autoriser l’opération, sous réserve d’engagements

Lorsque l’Autorité considère qu’une opération de concentration est susceptible d’engendrer des risques d’atteinte à la concurrence, les parties ont la possibilité de proposer des engagements, à tout moment de l’instruction, pour répondre aux problèmes de concurrence identifiés par l’Autorité. Si les engagements déposés sont considérés par l’Autorité comme suffisants pour remédier aux préoccupations de concurrence, l’Autorité peut autoriser l’opération en première phase sans qu’il soit nécessaire d’ouvrir une phase d’instruction approfondie dite de « phase II » (à l’issue de laquelle le collège de l’Autorité peut prendre une décision d’autorisation, d’autorisation avec des engagements voire d’interdiction si aucun remède ne peut rendre l’opération compatible avec la concurrence).

Au cas présent, l’Autorité a considéré que les engagements proposés par Elsan étaient suffisants pour autoriser cette opération au terme des délais d’instruction d’une première phase d’instruction.

Cession ne signifie pas fermeture de l’établissement mais reprise par un groupe concurrent
 

Les cessions faisant l’objet d’un engagement proposé par l’entreprise notifiante sont justifiées par la disparition d’une « pression concurrentielle » locale sur la nouvelle entité à l’issue de l’opération.

Leur objectif est de maintenir l’animation concurrentielle et la diversité de l’offre de soins pour les patients dans la zone concerné


1Décisions n° 13-DCC-90 du 11 juillet 2013 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Monoprix par la société Casino Guichard-Perrachon et n° 16-DCC-111 du 27 juillet 2016 relative à la prise de contrôle exclusif de Darty par la Fnac.
2Décision n° 13-DCC-46 du 16 avril 2013 relative à la prise de contrôle exclusif par le groupe Rossel des sociétés du Pôle « Champagne Ardennes Picardie » du groupe Hersant Média.
3Décision n° 12-DCC-100 du 23 juillet 2012 relative à la prise de contrôle exclusif de TPS et CanalSatellite par Vivendi et Groupe Canal Plus.

Contact(s)

Virginie Guin
Virginie Guin
Directrice de la communication
Yannick Le Dorze
Yannick Le Dorze
Adjoint à la directrice de la communication
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