Régulation du marché de la diffusion audiovisuelle : le Conseil de la concurrence est favorable à la proposition de l'ARCEP de soumettre TDF à une obligation de séparation comptable

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Dans le cadre de la procédure d'analyse des marchés des communications électroniques, le Conseil de la concurrence vient de rendre à l'Autorité de régulation des postes et communications électroniques (ARCEP) un avis sur les marchés de gros des services de diffusion audiovisuelle en France. Cet avis est le sixième que le Conseil rend dans ce cadre (cf. 04-A-17, 05-A-03, 05-A-05, 05-A-09, 05-A-10).

L'ensemble de ces marchés, recensé sous la dénomination de « marché 18 » par la Commission européenne (recommandation du 11 février 2003), comprend les services de radiodiffusion destinés à livrer un contenu radiodiffusé aux utilisateurs finals. Il comporte deux segments :

  • en aval, les prestations offertes par les diffuseurs aux éditeurs ou aux opérateurs de multiplex dans le cadre de la TNT (Télévision Numérique Terrestre) ;
  • en amont, les prestations offertes par un diffuseur à un autre diffuseur représentant un marché « de l'accès » (hébergement sur des pylônes existants par exemple).

Le marché 18, qui n'avait jamais fait l'objet d'une régulation sectorielle est à présent soumis au contrôle de deux régulateurs sectoriels.

Le CSA a le pouvoir de réguler (notamment par le règlement ex post des différends) la partie aval du marché (relations entre éditeurs/multiplex et diffuseurs/distributeurs). De son côté, l'ARCEP dispose de compétences sur la partie amont de ce marché (relations entre diffuseurs).

Le droit de la concurrence a permis par deux fois l'ouverture à la concurrence des marchés concernés.

Le Conseil de la concurrence a ordonné, le 1er décembre 2003 et le 11 avril 2002, des mesures conservatoires qui ont permis l'ouverture à la concurrence, d'une part, de la diffusion des services de radio de Radio France en FM, et d'autre part, du marché de gros de l'accès aux sites de TDF pour la TNT.

Le déploiement de la TNT a renforcé la contestabilité de la position de TDF et permis la montée en puissance de nouveaux acteurs.

En France, le déploiement de la TNT s'effectue en phases successives suivant un calendrier élaboré par le CSA. D'ici mars 2007, les 115 sites principaux prévus initialement par le CSA seront ouverts et devraient couvrir 85 % de la population française.

Pour chacune des phases et pour chaque site, des appels d'offres sont organisés afin de sélectionner l'opérateur diffuseur des différents multiplex. Ce processus de sélection permet d'introduire une forte pression concurrentielle sur les diffuseurs et facilite l'entrée de concurrents comme Antalis et Towercast, qui auraient eu plus de difficultés à gagner des parts de marché si les appels d'offres avaient été lancés à l'échelle nationale.

La croissance des parts de marché des concurrents de TDF en témoigne. Ces derniers détiennent aujourd'hui au total 25 % du marché en valeur et 30 % en volume en ce qui concerne la TNT.

Sur la partie amont du marché 18 (relations entre diffuseurs) relatif à la TNT, il est indéniable que TDF dispose d'une position particulière en tant que détenteur d'une infrastructure déjà existante.

Le Conseil de la concurrence relève que le caractère incontournable de certains sites de TDF provient en grande partie des barrières administratives ou réglementaires afférentes à ce secteur : par exemple les choix de l'organisation du déploiement de la TNT par le CSA avec des zones centrées sur des sites TDF, la rapidité des phases de déploiement imposée par le CSA et les pouvoirs publics ou encore des barrières administratives classiques (permis de construire, environnement, urbanisme).

Ces barrières apparaissent, à moyen terme, pouvoir empêcher ou du moins retarder l'évolution du marché vers une situation de concurrence effective.

Le Conseil de la concurrence observe également l'existence de problèmes liés à des prestations annexes (procédure d'intervention sur sites, alimentation en énergie, etc.). Ils peuvent au cas par cas constituer des obstacles à la présentation d'une offre par les nouveaux entrants ou menacer ultérieurement leur viabilité économique.

Le Conseil de la concurrence est favorable à une intervention ciblée et transitoire de l'ARCEP.

Le Conseil de la concurrence, tout en constatant une évolution réelle de la partie aval du marché 18 (relations entre diffuseur et éditeur/multiplex) vers une situation de concurrence effective, plus rapide et plus significative que dans d'autres pays européens, considère qu'il est légitime pour l'ARCEP de recourir à certains remèdes ex ante pour mettre en place, à titre transitoire, les conditions de marché aptes à faciliter cette évolution.

La priorité devrait être mise sur l'obligation de séparation comptable à l'égard de TDF.

Cette séparation comptable devra contribuer à faire apparaître clairement la manière dont se répartissent les coûts entre, d'une part, la diffusion de la télévision analogique et celle de la TNT et, d'autre part, les activités de diffusion et les autres activités de TDF.

De manière générale, l'existence d'une comptabilité analytique est le seul moyen de garantir l'effectivité d'injonctions visant à éliminer un effet de ciseau ou une discrimination tarifaire ou à imposer une orientation des tarifs vers les coûts, à l'égard d'entreprises détenant une position dominante ou monopolistique. Or, la mise en place d'une telle comptabilité dépend de l'impulsion du régulateur sectoriel.

Il apparaît enfin au Conseil que le pouvoir de règlement ex post des différends, notamment sur le marché en développement de la TNT, devrait permettre à l'ARCEP, dans le cadre qu'elle définira, de réguler de manière à la fois efficace et souple la transition vers une concurrence effective.

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Yannick Le Dorze
Yannick Le Dorze
Adjoint à la directrice de la communication
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