L'Autorité de la concurrence recommande d'alléger la régulation sectorielle pesant sur l'opérateur historique en ce qui concerne l'Internet haut débit dans les zones denses

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Elle invite également l’Arcep à entamer les travaux préalables à l’utilisation d’un nouvel élément de sa « boîte à outils » : l’éventuelle séparation fonctionnelle entre les activités de monopole et concurrentielles de France Télécom.


L’Autorité la concurrence rend aujourd’hui un avis sur le dispositif de régulation envisagé par l’Arcep concernant les marchés de gros du haut débit et du très haut débit pour la période 2011-2014. Il s’agit du troisième cycle d’analyse de ces marchés1.

Le succès de la régulation dans le secteur de l’Internet haut débit, dont l’Autorité se félicite, appelle désormais un allègement des obligations pesant sur France Télécom.

Le dégroupage de la paire de cuivre du réseau téléphonique2, imposé par la régulation sectorielle, constitue aujourd’hui le principal moyen d’accès au marché de l’Internet haut débit pour les opérateurs alternatifs. Il a permis le développement d’offres innovantes (triple play) à des prix attractifs pour les consommateurs. La France est régulièrement citée en exemple pour le dynamisme de son marché du haut débit. Dans les zones les plus denses du territoire, les opérateurs alternatifs (Free, SFR) font désormais jeu égal avec l’opérateur historique (Orange) sur le marché de détail résidentiel et dominent le marché de gros qui permet à de nouveaux opérateurs de déployer une offre pour les consommateurs.
 
Dans ces zones denses, devenues concurrentielles, l’Autorité de la concurrence estime que la régulation ex ante, qui impose aujourd’hui à France Télécom de fournir des offres de gros et en encadre les modalités, doit être allégée au profit de l’application du doit commun de la concurrence. Dans les territoires moins denses ainsi qu’auprès de la clientèle professionnelle, la position de l’opérateur historique demeure forte, ce qui justifie une action soutenue du régulateur.

L’Autorité de la concurrence propose d’instaurer une clause de rendez vous à dix-huit mois pour évaluer l’efficacité du dispositif de régulation du déploiement de la fibre optique.

La paire de fils de cuivre de France Télécom sera remplacée, à terme, par de nouveaux réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné, permettant de fournir des services à très haut débit. Les conditions de déploiement et d’exercice de la concurrence sur ces nouveaux réseaux sont déterminantes pour l’avenir du secteur.

L’Arcep joue pleinement son rôle en cherchant un juste équilibre entre les incitations à installer ces infrastructures et les obligations pesant sur les opérateurs investisseurs3. Cet équilibre, qui met l’accent à ce stade sur la concurrence par les infrastructures, doit être régulièrement évalué. Une clause de rendez-vous à dix-huit mois (à mi-parcours de l’analyse des marchés) apparaît nécessaire pour s’assurer de la bonne marche du dispositif de régulation : si, à cette occasion, il apparaissait que les possibilités d’investissement des différents opérateurs dans les réseaux étaient insuffisantes ou que les consommateurs disposaient d’une liberté de choix trop réduite, la régulation pourrait favoriser une concurrence par les services en imposant, de manière plus large qu’actuellement, la fourniture d’offres de gros d’accès à la fibre optique.

Par ailleurs, l’Autorité salue les évolutions positives sur le sujet de la montée en débit.

Les lignes téléphoniques les plus longues, souvent situées dans les zones rurales et périurbaines, offrent un débit limité. Ceci amène certaines collectivités territoriales à s’interroger sur la possibilité de financer la modernisation du réseau téléphonique de France Télécom. Sollicitée par l’Arcep sur ce point, l’Autorité de la concurrence avait relevé en décembre 2009 plusieurs risques dans son avis 09 A 574: que la concurrence régresse dans ces zones du fait du recul du dégroupage, que les appels d’offres des collectivités pour la mise en œuvre de ces projets soient biaisés par la position particulière de France Télécom, enfin que les zones concernées n’aient finalement jamais accès au très haut débit car les investissements de déploiement de la fibre optique s’en trouveraient découragés.

L’Autorité de la concurrence constate avec satisfaction que l’ARCEP a pris en compte cette préoccupation dans les travaux qu’elle a conduits pour permettre aux collectivités territoriales d’accroître rapidement les débits disponibles sur leur territoire sans pénaliser la concurrence à laquelle les consommateurs sont désormais attachés. Le schéma envisagé par le régulateur paraît pouvoir répondre, dans son principe, aux préoccupations concurrentielles formulées par l’Autorité.

L’Autorité rappelle qu’en tout en état de cause la modernisation du réseau téléphonique ne constitue qu’une des réponses possibles pour accroître les débits sur les territoires, le déploiement d’une nouvelle boucle locale en fibre optique restant, lorsqu’elle est possible, la meilleure solution sur les plans technologique et concurrentiel.

La séparation fonctionnelle de France Télécom fait désormais partie de la « boîte à outils » du régulateur sectoriel.

L’Arcep aura prochainement la faculté d’imposer à l’opérateur historique une séparation fonctionnelle entre les activités qui resteront durablement en monopole et celles qui relèvent du champ concurrentiel. Une mesure de ce type, comme il en existe dans la plupart des autres industries de réseaux régulées, peut apporter des garanties importantes quant au bon fonctionnement des marchés et alléger le contrôle de l’opérateur régulé. S’il est prématuré de se prononcer sur l’opportunité de recourir à un tel instrument dans le secteur des communications électroniques, l’Autorité invite l’Arcep à entamer les travaux préalables à son utilisation éventuelle.



1Voir les communiqués du 1er février 2005, du 20 novembre 2006 et du 6 juin 2008.
2Le dégroupage est l’opération technique permettant aux opérateurs alternatifs d’accéder à la boucle locale de cuivre de l’opérateur historique.
3Voir les communiqués du 22 septembre 2009 (avis 09-A-47) et 27 septembre 2010 (avis 10-A-18)
4Voir le communiqué du 14 avril 2010
 

 

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Yannick Le Dorze
Yannick Le Dorze
Adjoint à la directrice de la communication
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