Banque / Assurance

Sanction de plusieurs grandes banques et établissements de crédit pour entente dans le secteur du crédit immobilier aux particuliers

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Par une décision en date du 19 septembre 2000, rendue publique ce jour, le Conseil de la concurrence a sanctionné plusieurs grandes banques et établissements de crédit, pour avoir mis en œuvre en 1993 et 1994 une entente anticoncurrentielle dans le secteur du crédit immobilier aux particuliers. C’est la première fois que le Conseil de la concurrence connaît de pratiques anticoncurrentielles dans le secteur bancaire.

Les taux d’intérêt à long terme des crédits immobiliers, après avoir culminé au début des années 1980 à 20 %, ont chuté en quelques trimestres à partir de 1985 pour se stabiliser autour de 12 % à la fin de l’année 1992, date à laquelle ils ont enregistré à nouveau une baisse importante jusqu’en 1994 et se sont alors situés à un niveau compris entre 7,5 et 9 %.

En période de baisse des taux, lorsque l’écart entre les taux pratiqués pour les nouveaux prêts et les taux pratiqués dans la période antérieure atteint environ 2 %, les titulaires de prêts dont la durée restant à courir est supérieure à cinq/sept ans ont avantage soit à obtenir un réaménagement des conditions de leur prêt auprès de leur banque, soit à faire jouer la concurrence entre banques en remboursant par anticipation leur emprunt et en renégociant un nouvel emprunt avec un nouveau prêteur. Cette dernière possibilité est expressément prévue par l’article L 312-21 du code de la consommation.

Le Conseil de la concurrence a constaté que, face à cette situation, les principaux établissements de la place avaient conclu un « pacte de non agression interbanque » par lequel chacun d’entre eux s’interdisait de faire des propositions aux clients des autres banques souhaitant renégocier leurs emprunts immobiliers.

Outre que cet accord visait à empêcher la concurrence entre les banques, il permettait aussi à chacune d’elle de pouvoir mieux résister aux demandes de renégociation de ses propres clients puisque ceux-ci étaient privés de la possibilité de réagir à un refus de leur banquier en se tournant vers un autre établissement. Une telle action concertée entre les principaux acteurs d’un marché pour fausser la concurrence par les prix est non seulement prohibée par l’ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, mais constitue une pratique anticoncurrentielle considérée comme particulièrement grave par toutes les autorités de la concurrence.

Le Conseil de la concurrence, qui s’est saisi d’office, a rappelé que, si les activités bancaires font l’objet d’une réglementation spécifique, elles n’en demeurent pas moins également soumises, comme toutes les autres activités de service, réglementées ou non, au droit de la concurrence, que le fonctionnement concurrentiel du marché repose sur l’indépendance et l’autonomie des acteurs et que, dès lors que, à la suite de pratiques de concertation, toute incertitude est levée, le fonctionnement de la concurrence se trouve faussé, chaque établissement étant assuré que les autres réseaux bancaires appliqueront une même politique commerciale.

Le Conseil a noté que, même si l’accord de cartel qui liait les banques n’a pas été appliqué de manière uniforme, les emprunteurs ont été privés de la possibilité de diminuer sensiblement le montant de leur dette immobilière, alors que le logement constitue l’investissement en valeur le plus important des ménages et que le remboursement des emprunts nécessaires à cet investissement représente 30 % en moyenne de leur revenu disponible.

Selon les établissements bancaires, le montant des encours susceptibles d’être affectés par la renégociation des crédits immobiliers au cours de la période considérée était de 600 milliards de francs environ ; or, seuls 36 milliards de francs environ ont pu être renégociés par les ménages, ce qui a représenté pour eux un allégement de charges d’intérêt de 3 milliards de francs sur dix ans.

Compte tenu de la gravité de la pratique, de l’étendue nationale de l’entente mise en œuvre par les principaux opérateurs en matière de crédit immobilier aux particuliers, le Conseil a infligé des sanctions pécuniaires dont le montant total s’élève à plus d’un milliard de francs, soit 450 millions de francs à la Caisse nationale de Crédit agricole, 250 millions de francs à la Banque nationale de Paris, 250 millions de francs à la Société Générale, 100 millions de francs au Crédit lyonnais, 70 millions de francs à la Caisse Nationale des Caisses d’Épargne et de Prévoyance, 10 millions de francs à la Confédération nationale du Crédit mutuel, 8 millions de francs à la Caisse d’épargne des Alpes, 6 millions de francs à la Caisse régionale du Crédit agricole de Loire-Atlantique et 500 000 francs à la Fédération du Crédit mutuel Océan.

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Yannick Le Dorze
Yannick Le Dorze
Adjoint à la directrice de la communication
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