Presse / Médias

Le Conseil de la concurrence prononce des mesures conservatoires à l'encontre des messageries NMPP

presse

 

Par une décision du 22 décembre 2003, le Conseil de la concurrence, saisi par les Messageries Lyonnaises de presse (ci-après MLP), a prononcé des mesures conservatoires à l’encontre des Nouvelles Messageries de Presse Parisienne (ci-après NMPP) et de la Société Auxiliaire pour l’Exploitation de Messageries Transport Presse (ci-après SAEM-TP).

L’organisation du secteur de la distribution de la presse

Le marché de la distribution de la presse est organisé par la loi autour d’un principe coopératif.

Il comprend trois niveaux :

Les messageries de presse

Il existe en France trois messageries de presse (coopératives de distribution regroupant les éditeurs), qui distribuent les titres au niveau national.

  • Deux d’entre elles appartiennent au groupe Hachette et détiennent ensemble environ 85% du marché de la distribution de la presse :

- Les NMPP, qui distribuent des quotidiens et des publications, en particulier le Monde, Libération, l’Humanité, les Echos, la Croix.

- La SAEM-TP, qui distribue notamment les quotidiens le Figaro, l’Équipe, Paris Turf, Aujourd’hui France, et des publications comme Femme actuelle ou Maxi. Ne disposant pas de centre de traitement logistique, elle confie la sous-traitance de ses opérations aux NMPP.

  • Les MLP, qui distribuent de manière quasi-exclusive des titres à périodicité mensuelle ou supérieure. Cependant, depuis quelques années, elles ont décidé d’étendre leurs activités vers la distribution d’hebdomadaires comme Point de vue ou Marianne.

Un réseau intermédiaire : les dépositaires de presse

Les dépositaires jouent un rôle central dans la transmission d’information entre éditeurs et diffuseurs. Ils distribuent, aux marchands de journaux, la presse qui leur est confiée par les trois messageries et par certains éditeurs, notamment de la Presse Quotidienne Régionale (PQR). Ils ne sont pas en concurrence entre eux et bénéficient d’une exclusivité de distribution sur une zone géographique donnée.


Les diffuseurs de presse (marchands de journaux)

La mission du diffuseur est définie par le contrat dépositaire/diffuseur. Chaque marchand de journaux ne peut se fournir en titres de presse qu’auprès du dépositaire, qui a l’exclusivité de la distribution de ses titres.

L’accès au logiciel "Presse 2000"

Pour le suivi de la distribution de la presse, les dépositaires utilisent un logiciel appelé « Presse 2000 », conçu par les NMPP. Certaines fonctionnalités de « Presse 2000 », dénommées "tronc commun", sont partagées par les NMPP, SAEM Transport-Presse et les MLP. Les dépositaires l’utilisent pour gérer les flux d’informations avec les diffuseurs, pour tous les titres, quelle que soit la messagerie qui en assure la distribution.

Les MLP ont, quant à elles, développé leur propre système informatique, nommé TID, qui assure la transmission des informations chez les dépositaires. Elles font valoir que les NMPP refusent qu’un accès direct soit installé entre leur système TID et le logiciel « Presse 2000 », contraignant les dépositaires à procéder à des ressaisies manuelles coûteuses et génératrices d’erreurs.

Les pratiques tarifaires des NMPP et de la SAEM-TP

Les NMPP et la SAEM-TP ont des barèmes quasiment identiques, dans lesquels elles proposent une bonification exceptionnelle aux éditeurs qui s’engagent à leur être fidèles pendant un certain nombre d’années. Ainsi, les éditeurs qui restent clients entre 2000 et 2003, bénéficient d’une bonification correspondant à une remise de 1,10 %. De plus, le barème de la SAEM-TP, à la différence de celui des NMPP, prévoit une prime de fidélité, que les NMPP semblent utiliser comme argument commercial pour démarcher les clients des MLP.

Les MLP confient en exclusivité aux NMPP l’exportation d’un certain nombre de leurs titres. La proposition de contrat de prestation faite par les NMPP aux MLP comprend une clause d’exclusivité (obligeant ces derniers à confier l’intégralité de ses titres à l’exportation aux NMPP) ainsi qu’une prime de fidélité.

La plainte des MLP

Les MLP dénoncent des pratiques mises en œuvre par les NMPP et la SAEM-TP et soutiennent qu’il existe un groupe NMPP, qui serait en position dominante sur le marché de la distribution de la presse au numéro et qui tenterait de les en évincer. Les pratiques mises en cause sont essentiellement relatives, d’une part, à l’accès des MLP au système informatique mis en place par les NMPP et, d’autre part, aux conditions tarifaires proposées par les NMPP et la SAEM-TP.

L’atteinte grave et immédiate au secteur et à l’entreprise

Le Conseil de la concurrence a souligné que le secteur de la distribution de la presse se caractérise par une grande concentration de l’offre, puisque la part des deux premiers offreurs, les NMPP et la SAEM-TP, atteint 85 %. Il a rappelé que l’appartenance au même groupe de ces deux sociétés et le rapprochement de leurs politiques commerciales sont par ailleurs de nature à limiter l’intensité de leur relation concurrentielle et que dans ce contexte, les MLP, avec 15 % du marché, apparaissent comme leur seul concurrent.

Dans ce contexte, il a constaté que les pratiques tarifaires dénoncées ainsi que le refus d’accès direct au logiciel « Presse 2000 » étaient susceptibles de porter une atteinte grave et immédiate aux MLP, lesquelles ont connu une dégradation récente de leur chiffre d’affaires et de leur résultat.


Les mesures conservatoires prononcées

Le Conseil de la concurrence a considéré qu’il n’est pas exclu que les NMPP soient en situation de position dominante sur le marché de la distribution de la presse au numéro et qu’elles abusent de leur position dominante en refusant l’accès direct au logiciel « Presse 2000 » aux MLP.

En attendant de juger l’affaire au fond, il a enjoint aux NMPP d’accorder aux MLP un accès direct au tronc commun du logiciel « Presse 2000 », dans des conditions économiques équitables, en mettant en place un transfert automatique de fichiers entre le système informatique des MLP et « Presse 2000 ».

Par ailleurs, constatant les liens financiers et juridiques existant entre les NMPP et de la SAEM-TP et le fort parallélisme de leur politique commerciale, le Conseil de la concurrence n’a pas exclu qu’il soit nécessaire de prendre en compte la position conjointe des deux opérateurs pour évaluer l’effet sur la concurrence de leurs pratiques tarifaires et que dans ces conditions, leurs pratiques tarifaires de fidélisation soient susceptibles d’être anticoncurrentielles.

Il a par conséquent enjoint aux NMPP, à titre conservatoire, de ne pas reconduire le système de bonification exceptionnelle figurant dans leur barème et de suspendre l’application des remises de fidélité et de la clause d’exclusivité prévues dans leur contrat de distribution à l’export.

Il a également enjoint à le SAEM-TP de ne pas reconduire le système de bonification exceptionnelle et de suspendre l’application de ses remises de fidélité.

 

Contact(s)

Yannick Le Dorze
Yannick Le Dorze
Adjoint à la directrice de la communication
Imprimer la page