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L’Autorité de la concurrence est favorable au maintien d’une régulation ex ante du marché de gros amont des services de diffusion de la TNT

audiovisuel

L’essentiel

Dans un avis rendu ce jour à l’ARCEP, l’Autorité de la concurrence se déclare favorable au maintien d’une régulation ex ante du marché de gros amont des services de diffusion de la TNT sur la période 2015-2018. Il s’agit du marché sur lequel les diffuseurs ne disposant pas de leurs propres infrastructures de diffusion peuvent acheter des prestations d’hébergement de leurs équipements, sur les sites et les pylônes d’autres opérateurs, généralement situés sur des « points hauts » gérés par l’opérateur historique, TDF.

L’Autorité de la concurrence estime, comme l’ARCEP, que ce marché remplit toujours les conditions cumulatives exigées pour une régulation ex ante (barrières à l’entrée élevées et non provisoires, absence de perspective d’évolution vers une situation de concurrence effective et insuffisance du droit de la concurrence, seul, à remédier aux défaillances du marché), et que TDF continue d’y exercer une influence significative.

L’Autorité formule par ailleurs des observations pour favoriser le développement de la concurrence totale par les infrastructures, qui passe par la réplication des sites de diffusion de l’opérateur historique, car il s’agit du seul véritable vecteur d’indépendance et de développement des diffuseurs alternatifs dans la perspective de  la baisse de la demande de diffusion que va entraîner la diminution du nombre de multiplex à la suite du transfert de la bande 700 MHz, jusqu’ici dédiée à la TNT, vers les services de télécommunications.

Les marchés de gros des services de diffusion de la TNT

Pour assurer la diffusion de leurs programmes, les multiplex, qui regroupent les chaînes de télévision qui se partagent les mêmes fréquences, font appel à des opérateurs qui acheminent leurs signaux depuis des sites de diffusion, qui sont des points hauts couvrant les 1 626 zones de diffusion de la TNT définies par le CSA, jusqu’aux antennes des téléspectateurs.

Trois diffuseurs proposent de tels services sur le marché, dit marché de gros aval des services de diffusion de la TNT : le diffuseur historique TDF, présent sur toutes les zones de diffusion, ainsi que des opérateurs alternatifs, Towercast et Itas Tim-Onecast, qui ne sont présents que sur la moitié des zones de diffusion.

Pour proposer leur offre de diffusion aux multiplex, les concurrents de TDF peuvent opérer à partir de leurs propres sites de diffusion lorsqu’ils les ont créés (concurrence totale par les infrastructures) ou bien proposer une diffusion depuis les sites de TDF. Dans ce cas, deux possibilités s’offrent aujourd’hui à eux : installer leur système antennaire sur les pylônes de TDF (concurrence partielle par les infrastructures) ou utiliser celui de TDF (concurrence par les services).

La régulation en place depuis 2006

Compte tenu de l’influence significative exercée par TDF sur le marché, l’ARCEP a imposé à l’opérateur historique depuis 2006, et tout au long des trois premiers cycles de régulation, des obligations d’accès à ses infrastructures, de non-discrimination, de transparence et de contrôle tarifaire.

Pour ce nouveau cycle (2015-2018), l’ARCEP souhaite poursuivre la levée des freins à la concurrence totale par les infrastructures, tout en proposant des allègements afin de s’engager dans une levée progressive de la régulation. 

La pertinence du développement des infrastructures alternatives

Bien qu’elle se soit développée au cours des dernières années, la part de marché des opérateurs alternatifs reste nettement minoritaire (31,9 % des points de service et 30,8 % en valeur). Or, la concurrence ne peut continuer à croître sur le marché de gros aval des services de diffusion de la TNT qu’à travers le développement, en amont, d’une concurrence totale par les infrastructures qui permette aux alternatifs d’être indépendants de l’offre d’hébergement de TDF, en répliquant ses points hauts et ses pylônes.
Ce développement reste pertinent dans le contexte du transfert de la bande 700 MHz, jusqu’ici dédiée à la diffusion de la TNT, aux services mobiles à très haut débit, qui aura pour conséquence de contracter la demande à l’aval via la suppression de deux multiplex en avril 2016, en faisant passer leur nombre de 8 à 6.

Les recommandations de l’Autorité de la concurrence 

 Dans le détail, l’Autorité fait les recommandations suivantes :

  • L’Autorité est favorable à la levée de l’obligation pesant sur TDF de fournir une offre d’hébergement des systèmes antennaires alternatifs

Jusqu’ici, TDF était tenue de proposer aux diffuseurs alternatifs une offre d’hébergement pour leurs systèmes antennaires, adaptés seulement à la diffusion de la TNT. Or, dans les prochaines années, les diffuseurs alternatifs seront contraints de compenser la baisse de la demande de la TNT par la diffusion de la radio ou l’hébergement des équipements des opérateurs mobiles. Il n’est donc pas pertinent de maintenir une incitation à investir dans des infrastructures mono-service.

C’est pourquoi l’Autorité rejoint l’ARCEP qui estime que la promotion de la concurrence partielle par les infrastructures peut être abandonnée et que l’obligation qui incombait jusqu’ici à TDF de faire droit aux demandes d’hébergement antennaire peut être levée.

Pour autant, l’Autorité invite l’ARCEP à veiller à la préservation des investissements déjà consentis par les diffuseurs alternatifs pour développer cette forme de concurrence, en précisant les conditions dans lesquelles les accès déjà accordés devront être maintenus.

  • L’Autorité de la concurrence est favorable à ce que TDF modifie les clauses de sortie anticipée de ses contrats d’hébergement

 Un diffuseur alternatif qui souhaite, en cours de contrat, basculer vers son propre site les points de service qu’il diffuse depuis un site de TDF, est aujourd’hui redevable de pénalités particulièrement élevées.
 
Afin de lever les freins au développement de la concurrence totale par les infrastructures, l’Autorité est favorable, comme l’ARCEP, à ce que TDF soit obligée de proposer des conditions de sortie anticipée raisonnables.
 

  • L’Autorité de la concurrence n’est pas favorable à l’abandon de l’obligation de non-éviction

Lors du 3ème cycle de régulation, afin d’inciter les diffuseurs alternatifs à investir dans la mise en place de leurs propres sites, l’ARCEP avait interdit à TDF de pratiquer des tarifs d’hébergement « d’éviction », c’est-à-dire inférieurs aux coûts d’« un nouvel entrant efficace » sur les sites susceptibles d’être répliqués. L’ARCEP considère aujourd’hui que le maintien de cette obligation sur une trop longue période pourrait faire bénéficier les diffuseurs alternatifs d’une rente.

L’Autorité considère cependant que l’obligation de non-éviction devrait être maintenue sur l’ensemble des sites réplicables ou répliqués. En effet, sans cette obligation, l’opérateur historique pourrait être tenté de baisser ses tarifs d’accès, à la fois sur les sites facilement  réplicables, afin de décourager les diffuseurs alternatifs à répliquer ces sites, et sur les sites déjà répliqués, ce qui menacerait la rentabilité des  investissements déjà réalisés par les alternatifs. L’Autorité estime donc que, si cela apparaît nécessaire, l’ARCEP pourrait plutôt revoir les modalités de mise en œuvre de l’obligation de non-éviction.
 

  • L’Autorité est favorable au changement de méthode d’appréciation de la non-excessivité des tarifs d’accès

Afin d’éviter que TDF soit en mesure d’augmenter ses tarifs là où la concurrence est inexistante, l’ARCEP propose de continuer à imposer à TDF une obligation de ne pas pratiquer des tarifs excessifs,  en adaptant  cependant sa méthode d’appréciation de la non-excessivité, pour éviter toute augmentation qui paraîtrait excessive par rapport aux sites présentant des caractéristiques voisines.  L’Autorité est favorable à un tel changement.

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Yannick Le Dorze
Yannick Le Dorze
Adjoint à la directrice de la communication
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