Agriculture / Agro-alimentaire

L'Autorité rend un avis relatif à la situation dans le secteur des fruits et légumes frais en France

fruits-legumes

L’Autorité de la concurrence, saisie pour avis par une organisation professionnelle de producteurs de fruits et légumes, préconise l’introduction de mesures de flexibilité pour les organisations de producteurs.

Saisie par la Fédération Les Producteurs de Légumes de France, l’Autorité de la concurrence rend aujourd’hui un avis relatif à la situation dans le secteur des fruits et légumes frais en France et aux conditions d’application du droit de la concurrence dans ce secteur.

Rapports de forces déséquilibrés et fortes disparités de coûts de main d’œuvre entre les pays de l’Union  

Les fruits et légumes frais sont des produits périssables ou semi-périssables, difficilement stockables, dont la production est soumise à des aléas climatiques et aux cycles des saisons. Pour toutes ces raisons, il est difficile pour les producteurs de jouer sur les volumes de production en fonction de l’état des cours du marché. A l’inélasticité de l’offre s’ajoute un déséquilibre structurel entre une offre atomisée et une demande (constituée majoritairement de la grande distribution) fortement concentrée.  Il en résulte un rapport de force déséquilibré entre les acteurs et une forte volatilité des prix. 

Par ailleurs, il existe de fortes disparités de conditions d’exploitation au sein de l’Union européenne. Le coût de la main d’œuvre en France, du fait d’une progression plus rapide depuis 2000, est plus élevé que celui des deux autres principaux pays producteurs de fruits et légumes de l’Union européenne, l’Espagne et l’Italie, mais aussi que ceux des Pays-Bas et de l’Allemagne.

Face à cette situation, l’Autorité de la concurrence s’était déjà prononcée en faveur de mesures favorisant la sécurité juridique des producteurs 

Dans un précédent avis relatif à l’organisation économique de la filière des fruits et légumes(1), l’Autorité de la concurrence avait mis en avant la contractualisation, outil juridique alors peu utilisé et qui lui semblait pouvoir répondre de manière efficace, pérenne et sûre aux déséquilibres des relations commerciales entre agriculteurs et acheteurs. La contractualisation, qui consiste en la conclusion de contrats de vente écrits entre producteurs et acheteurs, introduisait une certaine visibilité pour les opérateurs du marché, tant pour les approvisionnements que pour la planification des investissements et des achats de matières premières. 

L’Autorité a ainsi souligné les bénéfices de contrats-type définissant des volumes, des prix et les conditions de leur évolution à moyen terme ainsi que des éléments de qualité. De tels contrats-types donnent de la visibilité aux opérateurs, pour autant que le contenu de chaque contrat reste négocié individuellement. De même, l’Autorité avait indiqué que la mise en place de clauses de révision des contrats en fonction de l’évolution des prix et des coûts était possible, dès lors qu’elles font l’objet d’une négociation bilatérale.

Par ailleurs, l’Autorité avait mis en avant d’autres pistes telles que le regroupement de l’offre, le développement de marchés à terme et la promotion de produits de qualité comme moyen de garantir un revenu stable et équitable aux agriculteurs.

Dans un nouvel avis rendu public aujourd’hui, l’Autorité de la concurrence préconise certaines mesures de flexibilité en faveur des organisations de producteurs afin d’encourager la concentration de l’offre et de donner aux producteurs les moyens d’une action efficace

Malgré les préconisations de l’Autorité et leur traduction dans la réglementation (loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche du 27 juillet 2010, dite « LMAP »), un fort déséquilibre des relations commerciales subsiste, aggravé par la réticence de certains producteurs à s’engager dans une organisation de producteurs et les difficultés qu’ils rencontrent à faire concurrence aux producteurs des autres pays européens ou non-européens.

De nouvelles flexibilités doivent donc être envisagées, dont certaines s’intègrent dans le contexte actuel de réforme de la politique agricole commune (PAC). 

A cet égard, l’Autorité estime que la suppression du critère relatif à l’absence de position dominante pour la constitution d’organisations de producteurs (OP), depuis l’entrée en vigueur du dernier règlement sur l’organisation commune des marchés (OCM) le 1er janvier dernier, doit être l’occasion d’une relance du mouvement concentratif.

Par ailleurs, l’Autorité préconise l’extension au secteur des fruits et légumes de l’assouplissement des conditions de négociations collectives des prix au sein des OP acté dans le dernier règlement OCM pour d’autres secteurs agricoles, comme le secteur laitier, de l’huile d’olive, des céréales ou de la viande bovine. Cette extension devrait donner aux structures les moyens d’une action plus efficace. 

Ces mesures pourraient être complétées pour une généralisation du principe de la contractualisation à l’ensemble de la filière. L’effectivité de la contractualisation dépendant fortement de l’adhésion des acteurs au dispositif retenu, des mesures incitatives, telles qu’une aide financière à la contractualisation, comme cela existe dans la filière ovine, pourraient également être envisagées.


L’Autorité est d’avis que ces différentes mesures devraient permettre de maintenir la diversité de l’offre dans le secteur, tout en faisant bénéficier les producteurs d’un meilleur partage du surplus entre les différents acteurs de la filière, ce qui, in fine, bénéficiera également au consommateur, s’agissant de produits de première nécessité.
 

(1) Avis n° 08-A-07 du 7 mai 2008 relatif à l’organisation économique de la filière fruits et légumes

 

Contact(s)

Yannick Le Dorze
Yannick Le Dorze
Adjoint à la directrice de la communication
Imprimer la page